La vague migratoire qui s’abat en ce moment sur l’Europe défraye la chronique. Sur ce sujet comme pour tout autre problème, il convient d’une fois revenir sur les principes, d’autant plus quand ils sont particulièrement dévoyés. Nous vous proposons donc un petit condensé de principes authentiquement chrétiens ayant trait à la délicate question de l’immigration. Nous rappelons également au passage que la revue bimestrielle Fideliter (http://www.clovis-diffusion.com/PBSCCatalog.asp?CatID=2596359), dans son numéro 175 de janvier-février 2007, publiait un dossier intitulé « Immigration, un regard chrétien ».

Une nation jouit d’un droit de propriété sur son territoire

Les théologiens enseignent unanimement que la Terre et ce qu’elle renferme ont été donnés par le Créateur à l’humanité en général, afin d’y habiter et d’en tirer sa subsistance. Cette destination universelle et primitive de la Terre perdure même sous les diverses appropriations.

Cependant, de solides raisons (ardeur au travail, bon entretien des choses, ordre, paix etc.) ont poussé l’humanité à pratiquer la propriété privée, et non exclusivement la propriété collective (qui existe néanmoins en un certain nombre de domaines : l’air que nous respirons, la science et la littérature, la lumière du soleil etc.). Le bien approprié devient donc « privé » : il appartient à un tel, et non pas aux autres. Cette appropriation peut être le fait d’un individu, d’une famille, d’une entreprise, mais aussi d’une cité ou nation qui s’attribue une portion déterminée de la Terre, autrement dit un territoire, un pays.

Une nation, étant propriétaire du pays qu’elle occupe, peut accepter de le partager ou non avec tel ou tel. C’est le principe de la propriété privée : je reçois chez moi qui je veux.

Il est bien évident que toute immigration est précédée d’une émigration. Il faut bien avouer que la majorité des migrants sont aujourd’hui des personnes qui quittent leur pays à cause de la misère qui y règne. C’est en ce sens que, le 23 juillet 1957, le pape Pie XII a parlé de « situation anormale » des émigrants. On peut donc considérer que, de ce fait, il y a ordinairement chez l’émigrant ce que les théologiens appellent un « état de nécessité ».

Les cas de nécessité étant très nombreux, on conviendra que tous ne peuvent pas donner lieu à une mise en suspens du principe de propriété privée, car cela ferait disparaître ce dernier ainsi que tous ses bienfaits pour le bien commun. Les théologiens ont donc précisé cette notion. Ils nous enseignent que seul un cas d’extrême nécessité, c’est-à-dire un péril de mort imminent ou d’un autre dommage de même ampleur, permet de se servir des biens du prochain, autant qu’il est nécessaire pour sauver sa vie ou celle de son prochain. En ce cas précis, les biens terrestres retrouvent exceptionnellement leur statut primitif, afin de servir tout homme. Dans les autres cas, la propriété privée doit impérativement être respectée pour des raisons graves de bien commun ; autrement, la sécurité publique et la confiance seraient en danger, ce qui constituerait un important dommage social. Bien entendu, les mêmes théologiens rappellent les devoirs de charité dans l’usage de cette propriété privée. Toutefois, la charité n’est pas exigible en justice.

L’immigration n’est pas purement et simplement libre. La Terre n’est pas aujourd’hui sans maître, les nations possèdent légitimement leur pays et peuvent, dans les limites de la justice et de la charité, y admettre qui elles veulent. Il appartient à l’autorité publique de défendre le bien commun de la nation elle-même, avant le bien des autres hommes ou du monde. Cette autorité publique doit donc mettre en place une politique d’immigration humaine, juste, généreuse, mais aussi prudente (la prudence est une vertu chrétienne), raisonnable, sage. Or, il ne serait ni raisonnable, ni sage, ni juste de laisser déferler des peuples entiers, par pur laxisme, au grave détriment du pays d’origine et du pays d’accueil.

En soi, les migrations ne sont pas souhaitables

L’Eglise catholique a toujours considéré que les migrations ne sont pas un mode de fonctionnement normal du monde, encore moins un fait positif qu’il faudrait rechercher ou promouvoir. En 1891, Léon XIII, dans son encyclique sociale Rerum novarum déclarait : « L’arrêt dans le mouvement d’émigration sera un avantage. Personne, en effet, ne consentirait à échanger contre une région étrangère sa patrie et sa terre natale, s’il y trouvait les moyens de mener une vie plus tolérable. » Pie XII, le 23 juillet 1957, parlait, quant à lui, de « situation anormale » des émigrants.

Bien entendu, cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas de cas légitime d’immigration d’un point de vue catholique. On peut citer, par exemple, le droit d’asile, s’appliquant à de vrais réfugiés politiques, contraints à l’exil pour une cause juste. Dans un tel cas légitime d’immigration, l’Etat d’accueil doit, par principe, se montrer hospitalier.

Il n’existe pas de droit absolu à l’immigration

En effet, d’une part, le pape Pie XII mentionne, dans sa Constitution apostolique du 1er août 1952 sur l’assistance spirituelle des émigrants Exsul familia, que l’immigration doit concerner « des étrangers nécessiteux et honnêtes », c’est-à-dire des étrangers qui, d’une part, ne peuvent réellement pas faire autrement que de quitter leur pays natal pour survivre et qui, d’autre part, sont respectueux du patrimoine matériel et spirituel et des lois du pays dans lequel ils s’installent. Cela condamne d’avance l’émigration (définitive, et non pas temporaire) de médecins, informaticiens, ingénieurs et autres « élites » tout comme de quiconque qui ne chercheraient à quitter leur pays natal que pour profiter des avantages sociaux et du niveau de vie du pays d’accueil, ce qui signifierait que leur seule patrie est leur confort personnel.

D’autre part, dans la même Constitution apostolique du 1er août 1952, Pie XII affirme que l’immigration peut être limitée pour des « motifs d’utilité publique ». Or ces motifs d’utilité publique n’existent-ils pas aujourd’hui en France et en Europe ? L’immigration massive actuelle est-elle bien respectueuse de l’identité des diverses nations d’Europe ? Est-elle conforme au bien commun de la cité ? Est-elle même conforme au bien particulier des immigrés ? Est-elle respectueuse du bien commun des pays dont elle est issue ? Si la réponse à toutes ces questions est non, il faut alors reconnaître que l’immigration, dans sa forme actuelle, doit cesser.

L’archevêque de Bologne, Mgr Biffi, déclarait dans le Figaro du jeudi 2 novembre 2000 : « Le droit à l’invasion n’existe pas. (…) Rien n’interdit à l’Etat italien de gérer l’immigration de manière à sauvegarder son identité nationale. »

Par ailleurs, ne serait-il pas logique que les immigrés soient d’abord accueillis par les Etats riches dont ils sont les plus proches à la fois géographiquement et culturellement ? En outre, les pays d’accueil ne devraient-ils pas pouvoir choisir les immigrés qu’ils vont recevoir, pour un meilleur respect de l’identité nationale ? Mgr Biffi défend ainsi cette idée : « N’y aurait-il pas avantage à gérer l’immigration de manière à privilégier les catholiques latino-américains, philippins ou érythréens [ex-colonie italienne] ? »

De toutes façons, si un Etat juge bon, par charité chrétienne, d’accepter une immigration limitée de vrais réfugiés politiques, il n’a pas à les entourer d’une sollicitude particulière qu’il n’aurait pas envers ses propres citoyens –ce qui serait, en outre, une préférence étrangère encourageant l’immigration clandestine et les faux demandeurs d’asile.

Ce qu’en disent les Ecritures et l’Eglise : la charité est bel et bien hiérarchisée

Les tenants de l’immigration-invasion ne se privent pas de rappeler l’exemple du bon Samaritain, ou encore de citer certains versets de la Bible tels que ceux-ci : « Si un étranger habite en votre terre, et s’il demeure parmi vous, ne lui faites point de reproches ; mais qu’il soit parmi vous comme un indigène ; et vous l’aimerez comme vous-mêmes : car vous avez été, vous aussi, étrangers dans la terre d’Egypte. » (Lévitique, XIX, 33-34) et « J’étais sans asile et vous m’avez recueilli. » (Matth., XXV, 35).

Il convient tout d’abord de ne pas interpréter abusivement de tels extraits des Ecritures saintes. Deuxièmement, nous verrons que la Bible et la théologie catholique regorgent d’autres assertions que les immigrationnistes se gardent bien de citer.

La citation du Lévitique ne dit certainement pas qu’il faut accueillir massivement des étrangers, mais simplement qu’il convient de bien les traiter. Quant à la citation de l’évangile selon saint Matthieu, elle ne fait que rappeler le devoir d’hospitalité (temporaire), qui est une des œuvres de miséricorde temporelle de la religion catholique et que nous avons à exercer en tant que chrétiens, à l’égard des inconnus nécessiteux de passage que Dieu a placés sur notre route. Enfin, l’histoire du bon Samaritain nous montre un étranger qui porte secours à un autochtone, et non l’inverse. Jésus-Christ veut nous montrer par là que la charité envers le prochain n’exclut personne ; mais il n’en est pas moins vrai que la doctrine catholique (comme en témoigne les références ci-dessous) fait une hiérarchie dans la charité.

« Si quelqu’un n’a pas soin des siens, et principalement de sa famille, il a renié sa foi, et il est pire qu’un infidèle. » (saint Paul, Première épître à Timothée, 5, 8)

« Comme tu ne peux être utile à tous, tu dois surtout t’occuper de ceux qui, selon les temps et les lieux ou toutes autres opportunités, te sont plus étroitement unis comme par un certain sort ; par sort en effet, il faut entendre quiconque t’est lié temporellement et qui adhère à toi, ce qui fait que tu choisis de l’avantager. » (saint Augustin, Doctrine chrétienne, L. I, ch. 28)

« Il faut que l’affection de l’homme soit ordonnée par la charité que d’abord et principalement il aime Dieu, ensuite soi-même, enfin le prochain, et parmi les prochains, davantage ceux qui sont les plus proches et plus à même de nous aider. » (saint Thomas d’Aquin, Compendium theologiae)

« La loi naturelle nous ordonne d’aimer d’un amour de prédilection et de dévouement le pays où nous sommes nés et où nous avons été élevés. » (Léon XIII, Sapientiae Christianae, 10 janvier 1890)

« Oui, elle est digne non seulement d’amour, mais de prédilection, la patrie, dont le nom sacré éveille les plus chers souvenirs et fait tressaillir toutes les fibres de votre âme, cette terre commune, où vous avez eu votre berceau, à laquelle vous rattachent les liens du sang et cette autre communauté plus noble des affections et des traditions. » (saint Pie X, Discours à l’évêque d’Orléans et à des pèlerins français, 19 avril 1909)

« Si la loi de charité s’étend à tous les hommes, même à nos ennemis, elle veut que soient aimées par nous d’une manière particulière les personnes auxquelles nous unit le lien d’une patrie commune. » (Benoît XV, Lettre apostolique Diuturni, 15 juillet 1919)

« Dans l’exercice de la charité, il existe un ordre établi par Dieu, selon lequel il faut porter un amour plus intense et faire du bien de préférence à ceux à qui l’on est uni par des liens spéciaux. Le divin Maître lui-même donna l’exemple de cette préférence envers sa terre et sa patrie en pleurant sur l’imminente destruction de la Cité sainte. » (Pie XII, Summi pontificatus, 20 octobre 1939)

Baudouin Lefranc

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