La mission Rosa Mystica 2017 a pris un relief tout particulier car elle s’est tenue exactement au même lieu et dans des conditions identiques à celles de 2008. Rien à voir avec ces cités ravagées par les typhons et ou les volontaires avaient appris à faire toute leur toilette avec un verre d’eau dans les ruines d’hôtels sans électricité. Qu’est devenue Saragani cette ville qui nous accueille au bout de dix ans ?

Comme à cette époque, ce fut l’accueil fastueux dans le Capitole, palais du gouverneur et copie de la Maison Blanche de Washington. Une partie des volontaires d’ailleurs y dormait.  Réceptions, aide du gouverneur Solon et de l’armée, tout y était pour faciliter notre travail. Il y a 9 ans le personnel était à notre disposition. Il en était de même. L’organisation  d’ACIM Asia s’était affinée. La qualité de la paraclinique (radio et labo) s’était développée tant à la ville qu’à la mission. Par ailleurs la plupart des spécialités médicales étaient représentées parmi les médecins volontaires. Spontanément s’est créée une sorte sympathie et d’entente-aide réciproque parmi les volontaires des 14 nationalités représentées à Rosa Mystica. Ce qui faisait nos différences n’aurait pas permis de cimenter deux simples pierres de la tour de Babel. Immédiatement une unité profonde s’était créée dans nos diversités.

Alors pourquoi parler de cette mission puisqu’elle se déroulait dans les conditions idéales et encore meilleures qu’il y a 9 ans ?  Tout simplement dans la mesure où tant de choses ont changé en cette petite décennie. En 2008, Steve Solon le gouverneur ou sa femme étaient à notre disposition constante. Malheureusement, le dimanche de notre arrivée Steve, toujours aussi cordial à notre égard, perdait sa maman familièrement appelée « Mom Priscilla ». Personnage prestigieux, décédée ainsi à l’âge de 100 ans ; elle avait littéralement créé cette province en 1992. Je fus d’ailleurs invité avec chaleur par Solon à la séance solennelle précédant ses obsèques. Mais comme l‘an dernier sa secrétaire, une charmante musulmane du nom de Asma était toujours à la disposition de Rosa Mystica. Elle n’avait pas vieilli et portait toujours un voile élégant. Mais à ma grande stupéfaction, à mon arrivée, elle se précipita dans mes bras pour m’embrasser. Il en fut ainsi tous les jours. Situation inimaginable il y a dix ans : à cette époque elle portait des gants pour que les hommes ne puissent lui toucher les mains. Que se passait-il donc ? Il fallait comprendre.

Toute une mutation était en train de se faire aux Philippines. En 1986. Corazon Aquino, catholique très pieuse, lutte contre la corruption ; elle a l’idée pour diminuer la prostitution et l’insécurité dans les grandes villes, de réinstaller les tribus traditionnelles dans leur milieu naturel tel qu’il était au moment de la conquête par Magellan en 1521. L’État et l’Eglise donnèrent des territoires immenses. Des commerces traditionnels et tout un artisanat se développèrent. De plus tous les propriétaires terriens dont les territoires étaient en friche ou en état de jungle devaient laisser 10 % des surfaces inexploitées aux malheureux. Des millions de pauvres villageois ne vivant de rien, se mirent à cultiver les mangues, l’ananas, la noix de coco, les melons etc. Leur condition économique changea alors lentement. Ceux qui vivaient sous des tôles ou de bâches, voire des toits en palmes de cocotiers ou feuilles de bananiers  se construisirent de petites maisons sommaires. L’économie progressa.

Il y a dix ans un malade sur deux toussait car le sol des rues était constitué d’une fine poussière volcanique grise.  Or beaucoup de voies étaient désormais cimentée et drainées. Finis les égouts déversées et coulant dans les rues le long des maisons. Une splendide autoroute mène à l’aéroport de General Santos qui se situe à 10 km de notre permanence et de notre église. L’infrastructure routière se développe rapidement.

Par ailleurs la sécurité s’était fort modifiée en partie par l’élimination des terroristes communistes ou islamistes. La plupart des barrages de contrôle tenus par militaires étaient disparus. L’entrée même de l’ensemble territorial du Capitole était à peine gardée. Jadis de nombreux soldats nous protégeaient et la sortie de son immense enceinte en était strictement interdite aux volontaires. Cette année, une douzaine de soldats mettaient de l’ordre dans la cohue des patients, montaient dans les villages pour amener des malades, assuraient nos déplacements en camion militaire. La sécurité est devenue totale. Toute une atmosphère s’en trouvait modifiée. Cependant, il ne faut pas oublier que 25 millions de Philippins vivent encore dans la misère en dessous du « seuil de la pauvreté ». 10% d’entre eux sont toujours expatriés pour gagner la vie et faire vivre leur famille. Soit 11 millions de personnes.

Les taux de croissance du pays tournent autour de 7 % depuis quatre ans (1,1 % en France en 2017). Il a été le plus important au monde après celui de la Chine en 2015. Lentement mais inéluctablement les Philippines émergent. Cette année sa progression économique sera la plus forte au monde après celle du Venezuela.

Que s’est-il passé  pour que les choses aient évolué ainsi ? Tout simplement par nature nonchalants les Philippins se sont rendu compte que plus ils travaillaient, meilleur était leur sort. Le temps est passé ou le Philippin moyen ne faisait qu’une seule chose dans la journée.

Jean-Pierre Dickès (a suivre)

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