Samedi 11 octobre, une guerre civile était sur le point d’éclater à Madagascar. Le 15 octobre, le colonel Michael Randrianirina, chef du CAPSAT (troupes d’élites), a annoncé qu’il assumerait la fonction de chef de l’État provisoire à partir de ce vendredi.
Des sources ecclésiastiques ont reconstitué les événements qui ont conduit à la fuite du président et à la prise du pouvoir par le colonel. « Lorsque les militaires du CAPSAT ont décidé de se mutiner et de descendre dans la rue pour défendre les manifestants, on craignait le pire. Les militaires se sont dirigés vers la place du 13 mai, lieu symbolique de la capitale et théâtre des principales manifestations à Madagascar. Ils y ont rencontré les gendarmes qui défendaient le palais présidentiel. Des tirs ont éclaté et au moins un militaire a été tué. Soudain, les gendarmes se sont retirés, permettant aux militaires d’entrer sur la place. »
Suite au départ du président Rajoelina, déclaré destitué par l’armée, une période d’incertitude institutionnelle s’ouvre. « Le colonel Randrianirina a annoncé que la Cour constitutionnelle suprême lui prêterait serment. Or, la Cour a été dissoute par l’armée elle-même il y a quelques jours. Il en résulte une confusion institutionnelle dont la résolution reste incertaine », soulignent les sources sur place.
Dans son annonce, le colonel Randrianirina a indiqué qu’il prendra ses fonctions avec le titre de « Président pour la Refondation de la République de Madagascar », en référence à son programme qui prévoit notamment une réforme constitutionnelle avant l’élection des représentants aux nouvelles institutions.
La sortie de crise est longue et les craintes de nouvelles violences ne se sont pas complètement dissipées.
Résumé de ce qui s’est passé
Ces dernières semaines, Madagascar a traversé une profonde crise politique et sociale, marquée par un vaste mouvement de protestation mené principalement par les jeunes. Les manifestations, qui ont débuté fin septembre, ont dénoncé les coupures prolongées d’eau et d’électricité, le chômage structurel et la corruption. Face à la montée des tensions, le gouvernement a décrété un couvre-feu dans la capitale, Antananarivo, et déployé les forces de sécurité qui ont fait usage de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc pour disperser les manifestants.
Le 29 septembre, le président Andry Rajoelina a dissous le gouvernement pour tenter d’apaiser la situation, mais cette mesure n’a pas réussi à endiguer les manifestations. Le 11 octobre, des unités d’élite de l’armée (CAPSAT) se sont mutinées et ont rejoint les manifestants, occupant des points stratégiques de la capitale, dont la symbolique place du 13 mai. Le lendemain, le Parlement a voté la destitution du président, malgré le fait qu’il ait ordonné la dissolution de l’Assemblée nationale.
Suite au coup d’État militaire, plusieurs institutions ont été suspendues, dont le Tribunal électoral et la Cour suprême, seule l’Assemblée nationale demeurant opérationnelle. Le colonel Michael Randrianirina s’est imposé comme une figure clé et a été confirmé président par intérim. Il a annoncé qu’il exercerait un mandat provisoire de deux ans maximum, durant lequel une réforme constitutionnelle serait menée et des élections organisées dans le cadre d’un nouveau cadre institutionnel dirigé par un conseil de transition composé de militaires, de gendarmes et de policiers.
L’Union africaine a suspendu toutes ses activités à Madagascar et exigé le retour à l’ordre constitutionnel par la tenue d’élections libres.
Nsango Ya Bisu
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