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« Je voudrais crier », par M. l’abbé Guillaume GAUD

Que le Seigneur nous octroie, durant l’année 2022, de nombreuses

âmes généreuses qui viennent frapper à la porte de nos séminaires !

« Il me prend souvent un désir de crier contre les universités, si j’y étais, et hurler de tout mon pouvoir comme si j’étais fou ; principalement contre l’université de Paris, comme la Sorbonne. J’adresserais mon oraison en criant contre ceux qui étudient pour beaucoup savoir, plutôt que faire profiter leur science à ceux qui sont dans l’indigence… en disant : « Mon Dieu, me voici prêt et appareillé, que vous plaît-il que je fasse ? Envoyez-moi là où il vous plaira, jusqu’aux Indes ou au bout du monde, mon Dieu, mon Seigneur, si tel est votre bon plaisir »… Mais le commun proverbe est le suivant « Je vais faire des études supérieures pour avoir quelque bon revenu, et puis après je vivrai à Dieu » [1]. Ces paroles de Saint François-Xavier reflètent le cœur des confrères de nos séminaires.

La situation mondiale actuelle, comme l’état dramatique de l’Église, nous poussent à crier avec confiance vers le Ciel : « Dieu de bonté… souvenez-vous des prières que vos serviteurs et servantes vous ont faites sur ce sujet depuis tant de siècles !… Votre Loi divine est transgressée ; votre Évangile est abandonné ; les torrents d’iniquité inondent toute la terre et entraînent jusqu’à vos serviteurs ; toute la terre est désolée ; l’impiété est au gouvernement, votre sainte Église est profanée, et l’abomination est jusque dans le lieu saint. Laisserez-vous tout ainsi à l’abandon, juste Seigneur, Dieu de Justice ? Tout deviendra-t-il, à la fin, comme Sodome et Gomorrhe ? N’avez-vous pas montré par avance à quelques-uns la future rénovation de votre Église ? Les juifs ne doivent-ils pas se convertir à la vérité ? N’est-ce pas ce que l’Église attend ? Toutes les créatures, même les plus insensibles, gémissent sous le poids des péchés innombrables de Babylone, la grande prostituée, la Cité mondiale à laquelle tous les rois de la terre se soumettent [2] ».

Nous formons des prêtres pouvant faire face

C’est-à-dire des prêtres forts, imperturbables, ne se laissant pas émouvoir dans les troubles actuels ; et pouvant ainsi être des rocs, des ancres pour les fidèles. C’est la vie d’oraison qui leur transmet cette sagesse, ce recul, et fait d’eux des prêtres libres de ces pièges.

Des prêtres libres, c’est-à-dire des esclaves de l’amour et de la volonté de Dieu; des hommes selon son cœur qui fassent sa volonté et terrassent ses ennemis ; pour cela, des prêtres très obéissants, toujours à l’écoute de la voix de leurs supérieurs, toujours prêts à répondre, toujours dociles dans la main divine.

Des prêtres libres, prêts à subir les foudres des accusations mensongères et des condamnations injustes, pour dénoncer humblement l’œuvre de destruction de l’Église opérée par sa hiérarchie actuelle, malade du libéralisme et du modernisme.

Des prêtres libres, l’esprit élevé au-dessus de la concupiscence par la pénitence et l’oraison, prêts à voler de tout côté selon le souffle de l’Esprit-Saint. Libres de la liberté des enfants de Dieu, détachés de tout, sans père, ni mère, ni frères et sœurs, sans amis selon le monde, sans biens, sans embarras, et surtout sans volonté propre. Et donc toujours humblement obéissants. Oui, là est le point crucial, le nœud de la sainteté.

Tout cela est l’œuvre du Seigneur ; Lui seul peut produire cela en nous, pour manifester à la face de la terre que c’est uniquement son œuvre, et que nulle chair ne se glorifie. Alors, « levez-vous Seigneur, dans votre toute-puissance, votre miséricorde et votre justice, pour vous former une compagnie choisie de gardes du corps, pour garder votre maison, pour défendre votre gloire et sauver les âmes, afin qu’il n’y ait qu’un seul pasteur et un seul bercail, et que tous vous rendent gloire à vous seul [3] ».

Mais pourquoi si peu de jeunes hommes nous rejoignent-ils ?

Parce qu’ils ne constatent pas assez qu’il y a tant de gloire, tant de douceur, tant de profit à Le servir ! Il y a tant de joie spirituelle à sauver des âmes pour l’éternité ! Il y aura une telle récompense pour ceux qui quittent tout pour vous servir… « le centuple, et la vie éternelle » ! Tant de joie à participer à cette bataille unique, prophétisée à l’avance, qui consiste à maintenir la foi catholique, la défendre contre toutes les hérésies qui ont envahi la sainte Eglise, et la transmettre pure ! Tant de joie à célébrer la sainte Messe et répandre quotidiennement le Sang de Jésus pour purifier les âmes ! Parfois, notre cœur de prêtre est triste, de la tristesse de Notre-Seigneur, mais souvent II nous donne une joie intérieure telle qu’on ne peut la nommer. On voudrait la crier, la répandre en tous : venez, et vous goûterez combien le Seigneur est doux. Mais que craignez-vous ? Les difficultés ? Écoutez donc St François-Xavier : « Je circule parmi ce peuple tout seul et sans interprète, car Antonio est malade… aucun d’eux ne comprend ce que je dis, et moi, je comprends encore moins ce qu’ils disent. Par là vous pouvez imaginer la vie que je mène et les exhortations que je fais ! Vous pouvez me voir essayant d’entrer en conversation avec les gens ! Cependant je baptise les nouveau-nés, et ceux que je trouve aptes au baptême ; pour cela je n’ai pas besoin d’interprète. Les pauvres me font comprendre sans interprète leurs besoins… les choses importantes dans la vie n’ont pas besoin d’interprètes…[4] »

La fatigue ? « Je suis déjà tout couvert de cheveux blancs, cependant, pour ce qui regarde les forces corporelles, il me semble que j’en ai maintenant plus que jamais. Les fatigues que l’on éprouve à travailler au milieu de gens intelligents, désireux d’apprendre selon quelle loi ils doivent faire leur salut, apportent avec elles une très grande joie. Ainsi à Yamagouchi, quand nous avons eu l’autorisation de prêcher, ma joie et ma consolation furent telles qu’il me semble pouvoir dire en toute vérité que jamais dans ma vie je n’en ai autant goûté [5] ».

En réalité, le zèle pour sauver les âmes donne une force surnaturelle. Saint François-Xavier, toujours enflammé de l’amour du prochain, voyant que son travail ne produisait pas beaucoup de fruit à Kagoshima, décida de se rendre dans une autre région, plus difficile, pour mériter de Dieu plus de grâces sur les âmes. Animé de ce désir de sauver les âmes qui se perdent, ni le froid, ni la neige, ni les pirates ne le firent retourner en arrière. Un tel prêtre encourageait par son exemple tous ses subordonnés qui avaient honte d’eux-mêmes en le voyant prêcher à ceux qui lui lançaient des pierres, toujours sourire dans le froid et la faim, et aller constamment de l’avant pour enseigner notre sainte foi catholique.

Le nécessaire affermissement de l’âme

Pour être plus aptes à devenir de saints prêtres à son exemple, nous cultivons un regard de foi qui nous donne un vrai respect et amour du prochain, quel qu’il soit : arrivé au Japon, le même saint ne cessait de tarir d’éloges sur ce peuple dans les lettres à ses confrères. C’est son secret, il regardait le bon côté de chaque peuplade, il admirait tout ce qu’il pouvait y admirer – même enfoui sous une masse de défauts et d’erreurs – et développait ainsi un amour surnaturel basé sur un amour naturel.

Cultivons aussi l’alliance entre l’esprit d’humilité et le don de soi. « Tenez-vous prêts, car il ne serait pas étonnant qu’avant deux ans j’écrive à beaucoup parmi vous de venir au Japon. Exercez-vous à acquérir une grande humilité, en vous renonçant vous-mêmes dans les choses où vous auriez à ressentir de la répugnance, travaillant de toute votre énergie à vous connaître intérieurement pour ce que vous êtes. Ainsi vous croîtrez en foi, espérance, confiance et charité pour Dieu et pour le prochain, car c’est de la défiance de soi que naît la véritable confiance en Dieu. C’est par cette voie que vous obtiendrez l’humilité intérieure dont vous aurez un plus grand besoin que vous ne pensez dans tous les pays. Veillez à ne pas vous appuyer sur la bonne opinion que le peuple a de vous, si ce n’est pour votre confusion. Par cette négligence, certains en viennent à perdre l’humilité intérieure : l’orgueil se glisse en eux [6] ».

C’est le but de notre année de spiritualité à Flavigny : ancrer dans le cœur de nos séminaristes ces convictions spirituelles profondes qui en feront, si Dieu veut, nos saints de demain.

Que le Seigneur nous octroie, durant l’année 2022, de nombreuses âmes généreuses qui viennent frapper à la porte du séminaire, et non seulement à nous, mais à tous ceux qui, dans l’Église, sont dociles entre les mains de Dieu. Comptant sur vos prières, nous vous assurons des nôtres, avec nos meilleurs vœux chrétiens de joyeux Noël, et de bonne et sainte année.

Abbé Guillaume Gaud, le 3 décembre 2021, en la fête de la propagation de la foi, Saint François-Xavier.

Source : Lettre aux Amis et Bienfaiteurs du Séminaire Saint-Curé-d’Ars n° 104

Notes de bas de page

[1] Lettre du 15 janvier 1544
[2] D’après St Louis-Marie Grignion de Montfort
[3] St Louis-Marie Grignion de Montfort
[4] Lettre du 21 août 1544
[5] Lettre du 29 janvier 1552
[6] Lettre du 5 novembre 1549

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