La violence directe contre les chrétiens reste une réalité en Turquie
Léon XIV était en voyage en Turquie du 27 au 30 novembre pour célébrer (de façon œcuménique) notamment le 1.700e anniversaire du premier Concile de Nicée (325), où fut rédigé le Credo. Il aurait été souhaitable qu’il lise préalablement le rapport rédigé par le Centre européen pour le droit et la justice sur la persécution des chrétiens en Turquie.
En voici la note d’introduction :
La Turquie, autrefois berceau du christianisme et foyer d’églises apostoliques, a vu sa population chrétienne disparaître en un siècle, passant d’environ 20 % en 1915 à moins de 0,3 % aujourd’hui. Ce déclin est le résultat de génocides, de pogroms et de politiques d’État systématiques visant à créer une nation musulmane sunnite turque ethniquement et religieusement homogène. Les 257 000 chrétiens restants (arméniens, grecs orthodoxes, syriaques, catholiques et protestants) continuent d’être confrontés à une hostilité juridique, institutionnelle et sociale.
1. La violence directe contre les chrétiens reste une réalité en Turquie, marquée par des attaques armées, des agressions ciblées et des menaces explicites. L’attentat de janvier 2024 à l’église Santa Maria, les agressions répétées contre l’église protestante de Çekmeköy et l’assassinat de membres de la communauté syriaque illustrent un climat d’insécurité inquiétant. Des pasteurs ont été agressés physiquement dans leurs lieux de culte, tandis que des graffitis hostiles visent régulièrement les églises. Ces incidents sont rarement reconnus comme des crimes de haine, ce qui renforce le sentiment de vulnérabilité des communautés chrétiennes.
2. Les discours de haine à l’encontre des chrétiens restent très répandus dans les médias et le discours public, tandis que l’éducation religieuse dans les écoles promeut une vision de l’identité turque indissociable de l’islam. Les chrétiens d’origine musulmane sont particulièrement exposés à la violence au sein de leur propre famille. Le génocide arménien, reconnu par le Parlement européen, la France et les États-Unis, continue d’être officiellement nié par les autorités turques.
3. Les autorités s’immiscent dans les élections patriarcales grecques orthodoxes et arméniennes, tout en refusant d’accorder la personnalité juridique à toute Église ou Patriarcat, y compris l’Église catholique, et en surveillant particulièrement les communautés protestantes et les chrétiens étrangers.
4. Les fondations communautaires chrétiennes sont privées du droit d’organiser librement les élections de leurs conseils d’administration. Des milliers de leurs propriétés ont été expropriées ; beaucoup ont été placées sous la tutelle de l’État (« mazbut ») ou nationalisées, bien qu’elles gèrent des églises, des hôpitaux et des écoles fournissant des services publics essentiels dans le cadre d’un système hérité de l’Empire ottoman. L’ECLJ intervient régulièrement dans de tels cas devant la Cour européenne des droits de l’homme.
5. Quelle que soit la confession, la formation du clergé reste extrêmement difficile : le séminaire de Halki pour les grecs orthodoxes est fermé depuis 1971, tandis que les communautés protestantes souffrent de l’expulsion des pasteurs étrangers et de l’absence de lieux de culte officiellement reconnus.
6. Les chrétiens étrangers – pasteurs, missionnaires ou convertis au christianisme – sont particulièrement visés sous de vagues prétextes de « sécurité nationale ». Depuis 2016, des centaines d’entre eux ont été expulsés ou interdits d’entrée au moyen de codes administratifs tels que G-87 et N-82, souvent sans preuve ni procès. Les cas d’Andrew Brunson, de Kenneth Wiest et d’Amanda Jolyn Krause illustrent cette persécution permanente. Même les réfugiés chrétiens d’Iran ou d’Afghanistan risquent d’être expulsés en violation du principe de non-refoulement. L’ECLJ a documenté ces violations et est intervenu dans de nombreuses affaires, notamment dans l’affaire Wiest c. Turquie, pour contester la discrimination structurelle subie par les chrétiens.
L’ECLJ appelle la Turquie à respecter et à protéger ses citoyens et résidents chrétiens, à respecter ses obligations en vertu du Traité de Lausanne, de la Convention européenne des droits de l’homme et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et à garantir une véritable liberté de religion et de croyance pour tous.
Pour accéder au rapport complet, cliquez ici.
Léo Kersauzie
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