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Ce soir, à La Tribune de la salle des assemblées au siège de l’ONU à New York, Emmanuel Macron, président de la République française, va reconnaître l’État palestinien.
En dépit des pressions communautaires, tant dans les coulisses des palais nationaux que dans les médias, le président Macron va reconnaître officiellement l’État palestinien.
Même si cela implique l’instauration de relations diplomatiques, cela s’apparente à une vaste opération de communication comme hélas l’ersatz de président nous a habitué depuis sa première prise de fonction en 2017.
Une fois de plus (je n’ose dire une fois de trop), la com macroniste ne trompe personne. Quels messages Emmanuel Macron veut-il adresser ?
Sur son flanc droit, Macron fait croire que la France demeure un État souverain, ce qui est sensé couper l’herbe sous le pied aux courants souverainistes qui déplorent les déroutes diplomatiques depuis la conquête du pouvoir par Brigitte et son mari. Force est de constater en effet que la France est la risée du monde entier et l’ombre d’elle-même sur la scène internationale.
Il n’aura échappé à personne que ladite reconnaissance ne fait que s’inscrire dans la droite ligne d’autres États. Par conséquent, il s’agit là davantage d’une affaire de suivisme que de l’expression d’une réelle souveraineté.
Sur son flanc gauche, Macron fait semblant de donner une réponse communautaire à l’électorat musulman de la France dite insoumise. Pitoyable tentative, car bien peu sont naïfs. Du reste, l’une des raisons de cette reconnaissance qui, en réalité, n’en est pas une, est la contention des communautés musulmanes dans des pays comme le Canada ou le Royaume-Uni.
Une reconnaissance en trompe-l’œil.
En réalité, ce que Macron s’apprête à faire à l’ONU n’est que du vent. Car Macron s’apprête à reconnaître un État qui n’en est pas un.
Les territoires où est sensée s’exercer l’autorité palestinienne ne sont que deux enclaves distantes l’une de l’autre de près de 130 kilomètres, ce qui rend très difficile voire impossible l’exercice d’une véritable souveraineté.
Ensuite, les conditions mises par Macron pour que la reconnaissance soit effective sont impossibles à remplir pour l’autorité palestinienne qui ne s’exerce guère au-delà des murs de ses bureaux.
En effet, Macron exige la disparition du Hamas, spécialement créé par Israël pour affaiblir l’autorité palestinienne. Par conséquent, l’autorité palestinienne n’a aucun contrôle. Il est dès lors peu probable que l’effet d’annonce soit suivi d’effet tout court.
Dès lors qu’on met la charrue avant les bœufs, on ne brasse que du vent.
Pour reconnaître un État, il faut d’abord qu’il ait des frontières et la Palestine a bien des frontières internationalement et juridiquement reconnues ainsi qu’en attestent les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité de l’ONU, mais cela ne se traduit pas sur le terrain.
Ensuite, un État palestinien doit être en mesure d’exercer sa souveraineté. Or, le premier exercice de la souveraineté est l’admission de qui bon lui semble sur son territoire. Donc (ainsi que le stipulent les résolutions), le retour des réfugiés.
Aujourd’hui, comme nous le savons, l’État d’Israël s’y oppose farouchement, au mépris du droit international le plus élémentaire.
C’est d’autant plus fort de café que l’État d’Israël lui-même s’est précisément construit sur ce droit élémentaire et souverain.
Un Conseil de sécurité verrouillé.
La dernière résolution contraignante à l’égard de l’État d’Israël date de plus de 50 ans. Depuis, les États-Unis opposent un veto systématique à toute résolution susceptible de faire avancer le dossier.
Il est intéressant de se poser la question pourquoi ce qui a été possible en 1967 et 1973 ne l’est plus aujourd’hui. En d’autres termes, qu’est-ce qui a fait que les États-Unis ne se sont pas opposés aux résolutions 242 et 338 ?
Le rôle central de la Russie.
En 1967 et 1973, les deux résolutions qui sont les seules hélas à faire référence encore aujourd’hui dès lors qu’on évoque le dossier n’ont été possibles que parce que la diplomatie soviétique jouait un rôle de contre-poids efficace.
Même si les États-Unis ont pesé pour rendre les résolutions le moins contraignantes possibles, ils n’ont pu s’y opposer qu’au prix d’un renforcement des relations entre l’URSS et le monde arabe, qui aurait eu pour effet de voir peut-être des pays arabes modérés basculer dans le camp soviétique.
La disparition de ce contre-poids laisse aux États-Unis les mains libres pour bloquer toute résolution sur le sujet, verrouillant ainsi toute possibilité de progrès raisonnable.
Seul le retour d’une diplomatie russe forte avec la multiparité qu’elle prône permettrait peut-être de débloquer les choses. Malheureusement, si cela doit se concrétiser, il faudra du temps.
Or, dans ce dossier comme dans d’autres, le temps presse.
Jacques Frantz
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