« Les plus révolutionnaires parmi les réformateurs
ont toujours été conscients de leurs actes révolutionnaires. »
C’est le 12 septembre dernier que Mgr Marian ELEGANTI (1) a publié cette nouvelle mise en cause du concile Vatican II.
C’est lui aussi qui, avec trois autres évêques, a participé à une prière de réparation contre le pèlerinage jubilaire des LGBTQ+ (2)
MPI vous propose aujourd’hui l’intégralité de ce nouveau texte où Mgr Eleganti relativise fortement les « fruits » du funeste concile Vatican II.
« Enfant, j’ai été témoin de l’iconoclasme dans la vénérable église Sainte-Croix de ma ville natale. Les autels gothiques sculptés ont été démolis sous mes yeux d’enfant. Il ne reste plus que l’autel populaire, le chœur vide, la croix dans l’arc du chœur, Marie et Jean à gauche et à droite sur des murs blancs et nus, et de nouveaux vitraux expressifs inondés par le soleil levant à l’est. Rien de plus : c’était un déboisement sans précédent. Nous, les enfants, trouvions tout cela normal et approprié et nous avons économisé avec ferveur pour le nouveau sol en pierre afin d’apporter notre contribution à la réforme ou à la rénovation de l’église. L’euphorie du Concile a été transmise par les prêtres, des synodes ont été convoqués, auxquels j’ai moi-même participé à l’adolescence. Je n’avais absolument aucune idée de ce qui se passait. Rien de plus : ce fut un déboisement sans précédent. Nous, les enfants, trouvions tout cela normal et approprié et avons économisé avec diligence pour le nouveau sol en pierre afin d’apporter notre contribution à la réforme ou à la rénovation de l’église. L’euphorie conciliaire a été relayée partout par les prêtres, des synodes ont été convoqués, auxquels j’ai moi-même participé en tant qu’adolescent. Je ne comprenais absolument pas ce qui se passait.
À 20 ans, j’étais novice et j’ai vécu de près et douloureusement les tensions liturgiques entre les traditionalistes et les progressistes parmi les réformateurs. De nouvelles professions ecclésiastiques ont été introduites, comme celle d’assistant pastoral (généralement marié).
Je me souviens de mes remarques critiques à ce sujet, car les tensions et les problèmes qui se profilaient lentement entre les personnes consacrées et non consacrées au service de l’Église étaient prévisibles dès le début. La chute du nombre de candidats à la prêtrise était prévisible et s’est rapidement manifestée. Adolescent, j’étais sans réserve à l’égard du concile, et plus tard, j’ai étudié ses documents avec une confiance fervente. Néanmoins, depuis l’âge de 20 ans, j’ai remarqué certaines choses : la désacralisation du chœur, du sacerdoce et de la Sainte Eucharistie, ainsi que de la communion, et l’ambiguïté de certains passages des textes conciliaires. Je l’ai très vite constaté, moi qui n’étais alors qu’un jeune laïc sans formation théologique. Même si le sacerdoce était depuis mon enfance l’option la plus forte dans mon cœur, je n’ai été ordonné prêtre qu’à l’âge de 40 ans. J’ai grandi avec le concile, j’ai grandi et j’ai pu observer son impact depuis qu’il a eu lieu. Aujourd’hui, j’ai 70 ans et je suis évêque.
Avec le recul, je dois constater que le renouveau de l’Église n’a pas eu lieu ; ce qui s’est produit, c’est un déclin indescriptible de la pratique et de la connaissance de la foi, une informalité et une arbitraire liturgiques généralisées (auxquelles j’ai moi-même contribué en partie, sans m’en rendre compte).
Avec le recul, je porte un regard de plus en plus critique sur tout cela, y compris sur le concile, dont la plupart des gens ont déjà dépassé les textes, en invoquant toujours son esprit. Que n’a-t-on pas confondu avec le Saint-Esprit, que ne lui a-t-on pas attribué au cours des 60 dernières années ? Que n’a-t-on pas appelé « vie » ce qui n’apportait pas la vie, mais la détruisait ?
Les soi-disant « réformateurs » voulaient repenser la relation de l’Église avec le monde, réorganiser sa liturgie et réévaluer ses positions morales. Ils continuent de le faire aujourd’hui. Leur réforme se caractérise par la fluidité de la doctrine, de la morale et de la liturgie, l’alignement sur les normes séculières et la rupture postconciliaire et impitoyable avec tout ce qui existait auparavant. Pour eux, l’Église existe surtout depuis 1969 (Editio Typica Ordo Missae. Card. Benno Gut). Ce qui existait auparavant peut être négligé ou a déjà été révisé. Il n’y a pas de retour en arrière possible. Les plus révolutionnaires parmi les réformateurs ont toujours été conscients de leurs actes révolutionnaires. Mais leur réforme postconciliaire, leurs processus, ont échoué sur toute la ligne. Ils n’étaient pas inspirés. L’autel du peuple n’est pas une invention des pères conciliaires.
Je célèbre moi-même, y compris en privé, la Sainte Messe selon le nouveau rite. Mais en raison de mon activité apostolique, j’ai réappris l’ancienne liturgie de mon enfance et je vois la différence, surtout dans les prières et les postures, mais aussi bien sûr dans l’orientation. Rétrospectivement, l’intervention postconciliaire dans la forme très constante de la liturgie, vieille de près de deux mille ans, m’apparaît comme une reconstruction assez violente et provisoire de la Sainte Messe dans les années qui ont suivi la fin du concile, qui a entraîné de grandes pertes qu’il convient de combler. Cela s’est également produit pour des raisons œcuméniques. De nombreuses forces, y compris du côté protestant, ont directement contribué à aligner la liturgie traditionnelle sur la Cène protestante et peut-être aussi sur la liturgie sabbatique juive. Cela a été fait de manière élitiste, disruptive et imprudente par la Commission liturgique romaine et a été imposé à toute l’Église par Paul VI, non sans causer de grandes fractures et déchirures dans le corps mystique du Christ, qui subsistent encore aujourd’hui.
Une chose est sûre pour moi : si l’on juge l’arbre à ses fruits, une réévaluation impitoyable et sincère de la réforme postconciliaire s’impose de toute urgence : honnête et minutieuse sur le plan historique, non idéologique et ouverte, à l’image de la nouvelle génération de jeunes croyants qui ne connaissent ni ne lisent les textes conciliaires.
Ils n’ont pas non plus de problème de nostalgie, car ils ne connaissent l’Église que sous sa forme actuelle. Ils sont tout simplement trop jeunes pour être traditionalistes. Cependant, ils ont vu comment fonctionnent les paroisses aujourd’hui, comment elles célèbrent la liturgie et ce qui reste de leur propre socialisation religieuse par la paroisse : peu de choses ! C’est pourquoi ils ne sont pas non plus progressistes. Le catholicisme libéral ou le progressisme depuis les années 70, dernièrement sous la forme du Synodal Way, a fait son temps du point de vue actuel et a conduit l’Église dans une impasse. La frustration est donc grande. Nous pouvons le constater partout. Les messes du dimanche et des jours ouvrables sont principalement fréquentées par des personnes âgées. Les jeunes sont absents, sauf dans quelques rares lieux de culte très fréquentés. La réforme se fait d’elle-même, car plus personne ne va à l’église ou ne lit les résultats, c’est une loi d’airain.
Comment peut-on encore aujourd’hui considérer la réforme postconciliaire de manière aussi peu critique et bornée, au vu de ses fruits ? Pourquoi n’est-il toujours pas possible d’aborder honnêtement la tradition et sa propre histoire (ecclésiastique) ? Pourquoi ne veut-on pas voir que nous sommes à la croisée des chemins et que nous devrions revoir nos positions, notamment sur le plan liturgique ? Être ou ne pas être dans la foi et la vie ecclésiale se décide sur le terrain de la liturgie. C’est là que l’Église vit ou meurt. Les traditionalistes et les progressistes l’ont bien compris depuis 1965. Pourquoi alors la tradition a-t-elle le vent en poupe chez les jeunes ? Qu’est-ce qui la rend si attrayante pour eux ? Réfléchissez-y ! Ce sont les pieds qui votent, pas les conseils. Peut-être devrions-nous simplement changer de direction ! Vous comprenez ?
Source : Texte original en allemand
Même si une hirondelle ne fait pas le printemps, nous remarquons, qu’après feu Mgr Huonder, ce sont plusieurs cardinaux et évêques qui commencent à ouvrir les yeux, ceux de la Foi.
Prions pour qu’enfin, ils rejoignent clairement et sans faux semblants le combat de la Tradition comme l’avait fait clairement et définitivement Mgr Lazo le 21 mai 1998.
Christian LASSALE
Notes de bas de page
(1) Notice biographique du site de Mgr Eleganti : « Marian Eleganti est né le 7 avril 1955 à Uznach, dans le diocèse de Saint-Gall. Après avoir terminé ses études secondaires à Einsiedeln (1967-1974), il a étudié la philosophie et la théologie, avec de longues interruptions, à Einsiedeln (1974-1976), Rome (1977-1978) et Salzbourg (1990-1995), où il a obtenu son doctorat en théologie fondamentale en 2003. Sa thèse : « Il faut avoir de bonnes intentions pour penser avec vérité. » Contribution à la conception de la vérité selon Romano Guardini (Salzburger Theologische Studien 22), Innsbruck 2003. De 1978 à 1990, il fut membre de la communauté laïque fondée par Josef Seidnitzer (†), qui ne fut reconnue que plus tard par l’Église sous le nom de « Famille de Marie ». En 1990, il entra au noviciat des Missionnaires Bénédictins à l’abbaye Saint-Otmarsberg d’Uznach. Le 2 octobre 1994, il fit profession solennelle. Le 23 juin 1995, Mgr Ivo Fürer l’ordonna prêtre. En 1999, Marian Eleganti devint le deuxième Abbé de la jeune abbaye. Il reçut sa bénédiction d’Abbé le 29 août 1999. De 2005 à 2018, il fut aumônier conventuel et membre de troisième classe de l’Ordre de Malte. Le 7 décembre 2009, le pape Benoît XVI le nomme évêque auxiliaire du diocèse de Coire. Il est évêque titulaire de Lamdia. Il a été ordonné évêque le 31 janvier 2010 à Coire. Initialement nommé vicaire épiscopal avec une responsabilité régionale particulière pour Zurich et Glaris, il est, de 2011 à l’été 2014, recteur du séminaire Saint-Luzi à Coire et vicaire épiscopal pour la formation philosophique et théologique, la formation continue et la formation continue des pasteurs du diocèse de Coire. De 2010 à 2018, il est évêque des jeunes pour la Suisse alémanique et le Tessin, au nom de la Conférence des évêques suisses. De 2014 jusqu’à sa retraite, il est vicaire épiscopal pour la nouvelle évangélisation, la jeunesse et la famille, ainsi que pour les communautés religieuses et monastiques. De 2010 à 2018, il a été évêque suisse des jeunes et, durant la même période, aumônier de l’Association helvétique de l’Ordre de Malte. Membre de la Conférence des évêques suisses, depuis son ordination épiscopale (2010), il est principalement responsable de la pastorale des soins de santé (aumônerie hospitalière, résidentielle et pénitentiaire, aumônerie universitaire, jeunesse et famille, et homosexuels). L’évêque auxiliaire Eleganti est membre de l’Académie européenne des sciences et des arts, basée à Salzbourg. Il s’est également fait connaître du grand public grâce à ses retraites, conférences et prédications, ainsi qu’à son travail avec Radio Horeb, Radio Maria, EWTN Europe, l’Aide à l’Église en Détresse, et en tant qu’intervenant lors de festivals de la jeunesse et de la famille en Suisse et à l’étranger. Le pape François a déjà accepté sa demande d’éméritat le 4 décembre 2019 (« nunc pro tunc », « maintenant et pour alors »). Elle est entrée en vigueur le lundi 15 février 2021. Depuis 2020, il est directeur spirituel et membre du conseil d’administration de l’Association suisse des médecins catholiques (VKAS). Il a quitté l’Ordre de Malte en 2021. Depuis 2022, il est directeur spirituel des groupes d’études bibliques Emmanuel. En décembre 2022, il a été nommé assistant ecclésiastique de la FIAMC (Fédération internationale des associations de médecins catholiques). Cette nomination a été faite par le cardinal Kevin Farrel (Dicastère pour les laïcs, la famille et le développement humain, Rome) ».
(2) Plusieurs évêques, l’évêque américain Joseph Strickland, l’évêque auxiliaire kazakh Athanasius Schneider, l’évêque auxiliaire néerlandais Rob Mutsaerts et l’évêque auxiliaire émérite suisse Marian Eleganti, ont organisé à Pittsburgh (États-Unis), le 4 octobre 2025, une prière de réparation suite au pèlerinage LGBTQ+ tenu un mois plus tôt à Rome. Un événement considéré par eux comme une profanation de la basilique Saint-Pierre.
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