Selon ITélé, les premiers mots qu’aurait prononcé François Hollande en débarquant à l’aéroport de Moscou, auraient été: “je vous ai entendu”, faisant référence au discours devant l’Assemblée fédérale (appelé aussi discours à la nation)  qu’à prononcé le  jeudi 4 décembre Vladimir Poutine. Un discours qu’il avait entamé en se réjouissant de l’unité de la fédération de Russie derrière son chef: “Cette année, nous avons été confrontés à des événements auxquels seule une nation unie et adulte et un état véritablement souverain et fort peuvent résister. La Russie a prouvé qu’elle peut protéger ses compatriotes et défendre la vérité et l’équité.”

Un discours, que j’ai intégralement traduit ici, prononcé le 4 décembre, aux accents très fédérateurs, très patriotiques, un discours pour préparer les mentalités à une éventuelle agression: “Nul ne saura jamais atteindre de supériorité militaire face à la Russie. Nous avons une armée moderne et prête au combat. Comme c’est nécessaire maintenant, une armée polie, mais redoutable. Nous avons la force, la volonté et le courage de protéger notre liberté.”.

Un discours qui ne laisse aucune illusion quant à l’inefficacité des sanctions économiques et autres brimades et humiliations des autorités Occidentales. Mais si le but des sanctions initiées par les USA était de provoquer la guerre ?

L’assurance du chef d’Etat russe est en effet difficile à ébranler, puisque contrairement à ses homologues occidentaux, il a largement gagné en popularité durant son mandat présidentiel. Il avait été élu en 2012 avec 63% des voix et aujourd’hui tous les instituts de sondage lui accordent plus de 80% d’opinions favorables. Le soutien d’une nation est la meilleure motivation d’un chef d’Etat, ce n’a pas du manquer d’impressionner François Hollande qui ne cesse de dégringoler dans les sondages d’opinion à des niveaux jamais atteints par aucun de ses prédécesseurs.

Le discours de Vladimir Poutine ne peut non plus laisser aucune illusion quant à l’appartenance définitive de la Crimée à la Russie:

« Ce fut en Crimée (…) que le Grand Prince Vladimir fut baptisé avant d’apporter le christianisme à la Russie. (…), le christianisme a été une puissante force unificatrice spirituelle qui a contribué à impliquer les diverses tribus et les unions tribales du vaste monde slave orientale dans la création d’une nation russe et de l’Etat russe. Ce fut grâce à cette unité spirituelle que nos ancêtres pour la première fois et pour toujours se sont considérés comme une nation unie. Tout cela nous permet de dire que la Crimée, (…), et Sébastopol ont une importance civilisationnelle et même sacrée inestimable pour la Russie. » (V.Poutine)

François hollande a donc choisi de ne pas évoquer le sujet, préférant, a-t-il dit,  régler le problème le plus urgent en premier, c’est-à-dire, la crise ukrainienne; la crise ukrainienne qui, si elle se réglait, règlerait aussi le problème de la livraison des Mistrals… On se demande laquelle de ces deux priorités arrive en premier pour François Hollande, alors que la guerre menace de s’étendre et que la France a un traité d’alliance qui jusqu’ici ressemble surtout à de la vassalité, avec le va-t-en-guerre américain.

Peut-on imaginer que la fierté de François Hollande ait pu être piquée au vif par l’ironie dédaigneuse de Poutine déclarant:  “Si pour certains pays européens la fierté nationale est un concept oublié depuis longtemps et la souveraineté un luxe beaucoup trop cher, la véritable souveraineté pour la Russie est absolument vitale.” ? En tout cas il a déclaré devant les journalistes à son hôte«Nous devons éviter qu’il y ait d’autres murs qui viennent (nous) séparer. A un moment, il faut être aussi capable de dépasser les obstacles et trouver les solutions”, “Nous devons trouver des solutions ensemble. Il y a un moment, des périodes, où il faut saisir des occasions. Nous en sommes arrivés là», et justement  dans son  discours à la nation  Poutine affirmait : “Nous ne nous laisserons jamais enfermer dans la voie de l’auto-isolement, de la xénophobie, de la suspicion et de la recherche d’ennemis”.

Si cette visite à Moscou de François Hollande s’est annoncée comme inopinée, il semble qu’en réalité le détour par le Kazakhstan lui ait au contraire permis de la préparer:  «Nous allons travailler ensemble pour chercher tous les points qui permettront de clarifier et d’engager une désescalade» avait-il dit lors d’une conférence de presse vendredi dernier au Kazakhstan, ajoutant «nous (en) avons besoin, car il y a des risques, toujours, d’une escalade supplémentaire et des menaces sérieuses sur l’économie de l’ensemble de la région», «La tension, la pression ne sont jamais des solutions», tout en plaidant pour une «désescalade» militaires en Ukraine. «Je n’ai jamais cessé de chercher le dialogue», avait-il fait valoir, la France étant «dans une position qui lui permet de parler aux uns et aux autres» et d’avoir leur «confiance».

La proximité du Kazakhstan avec la Russie (les deux pays sont frontaliers) était donc le prétexte pour Hollande d’aller faire avancer le dossier du Mistral même si officiellement le sujet n’a pas été abordé au cours de l’heure trente de discussion entre les deux chefs d’Etat. Vladimir Poutine plaide toujours pour que tout le monde puisse sauver la face.

François Hollande a toujours affirmé que la livraison des porte-hélicoptères Mistral dépendait de l’attitude de la Russie dans la crise ukrainienne, partant de l’a-priori que la Russie était l’agresseur dans le conflit entre les partisans de la Novorossiya et le pouvoir de Kiev . Or lorsqu’on observe une carte on se rend immédiatement compte que c’est l’OTAN qui encercle et cerne de plus en plus la Russie, en dépit de ses promesses en échange de la suppression du mur de Berlin, de ne plus avancer vers l’Est au-delà de l’Allemagne, puisque maintenant elle s’est même installée aussi en Ukraine, ce dont la carte ci-dessous ne tient pas compte. (Explications et vidéo à la suite).

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«Ces problèmes sont bien difficiles. Mais nos discussions ont des résultats positifs», a dit pour sa part Vladimir Poutine, à la suite de cette entrevue avec François Hollande.  Prouvant ainsi qu’il n’a cessé de le répéter qu’il ne fermait la porte à personne.

Jusque-là, cette visite est toute au crédit de François Hollande qui nous surprend agréablement en donnant l’impression de vouloir prendre les choses en mains indépendamment de toute tutelle. Hélas, pas si sûr. “Selon une source à la présidence française, il a appelé la chancelière allemande Angela Merkel pour la prévenir de son escale surprise à Moscou. Il s’est également entretenu par téléphone avec son homologue ukrainien Petro Porochenko.” rapporte encore l’AFP. A son retour il s’est aussi empressé de prendre contact avec la chancelière. On notera qu’il n’a pas jugé utile de rendre compte à ses homologues espagnols ou italiens… Comme s’il ne pouvait rien faire sans rendre compte à l’Allemagne, mais que le reste des nations de l’UE comptaient pour du beurre.

On le voit François Hollande n’a pas eu le front de se rendre à Moscou sans demander la bénédiction et sans doute les consignes de la chancelière allemande avant de rencontrer le président russe avec lequel il a tout-de-même un lourd problème à résoudre, un problème de 190 mètres, qui encombre un bassin des chantiers navals de Saint-Nazaire.

C’était sous la pression impérative d’Obama qu’après avoir longtemps atermoyé, il avait finalement renoncé à livrer le navire à la Russie, mais nullement pour des considérations d’intérêts français.

La conjoncture d’une visite à Moscou ne pouvait donc pas être meilleure pour offrir une ouverture à François Hollande auprès de Poutine tout en plastronnant un peu,  alors que les deux parties belligérantes d’Ukraine ont signé un cessez-le-feu qui devrait prendre effet à partir du 9 décembre prochain. Même si pour le moment les affrontements se sont au contraire intensifiés, François Hollande sauve ainsi la face en reprenant langue avec Vladimir Poutine, et en se donnant en prime une stature de médiateur.

En marge de cette rencontre le président Poutine a rappelé qu’il ne doutait pas que le Vladivostok allait finalement être livré, mais que dans le cas contraire, la France aurait à s’acquitter de l’accord transgressé.

“La rencontre arrivait au bon moment, dans la bonne circonstance et donnera sans doute, dans les prochains jours, quelques résultats”, a déclaré François Hollande à bord de son avion, regagnant Paris. Et d’enchaîner: “Si le 9 décembre, le cessez-le-feu se confirme, alors on pourra envisager d’aller plus loin, mais si dans deux ou trois semaines il y a encore des morts, alors nous en prendrons acte.”

Comme s’il n’y avait pas eu de coup d’Etat en Ukraine, comme si c’était normal qu’un pouvoir central fasse la guerre à l’artillerie lourde à sa population et bombarde des civils…. Comme si la France n’était pas la première victime de son suivisme américain. Toujours la politique de “l’esbroufe”. Comme si la réalité n’était pas subie au quotidien par les Français et en tout particulier les agriculteurs, les premières victimes. Mais on sait combien le système déteste les agriculteurs. Ne nous empressons donc pas trop de nous berner par ces rodomontades alors qu’on sait bien qu’au fond de tout cela, c’est Moscou qui tient le plus gros levier avec le contrat des Mistrals, toujours pendant.

La visite de François  Hollande est la première d’un dirigeant occidental en Russie depuis le début de la grave crise ukrainienne, bien que les chets d’Etat occidentaux, dont Hollande, aient eu plusieurs occasions de rencontrer le président de Russie. 

Pour l’anecdote, le spécialiste stratégie de BFMTV a osé dire que si le Vladivostok était livré à la Russie, l’Ukraine serait en danger parce que Poutine s’en servirait pour aller en mer d’Azov menacer les troupes de Kiev! Comme si l’armée russe en était à attendre le Vladivostok! Ils prennent vraiment les gens pour des imbéciles. L’armée russe est la plus puissante du monde après celle des USA… “Mentez, mentez,, il en restera toujours quelque chose” (Machiavel)

En ce qui concerne le cessez-le-feu, la Novorossiya a récusé la participation des USA aux accords de Minsk qui devaient s’ouvrir incessamment et auxquels ceux-ci s’étaient invités, ce qui gèle pour le moment les discussions. En effet les dirigeants du Donbass estiment à juste titre que la crise ukrainienne est l’oeuvre des Américains; ils refusent donc de s’assoir à la même table que leurs ennemis jurés. Les USA sont devenus les occupants quasi-officiels de l’Ukraine de l’Ouest, après avoir investi un étage entier du ministère de la Défense à Kiev, et, ce qui est beaucoup plus grave, trois ministères-clés: les finances, l’économie et la santé publique leur ont été concédés à travers des étrangers naturalisés en toute hâte par Porochenko la semaine dernière. Les mondialistes n’ont plus peur de rien! Le Donbass n’entend pas se soumettre à son tour à l’Empire.

Trois américains ministres clefs du gouvernement ukrainien

Le budget ukrainien sera désormais établi par l’Américaine d’origine ukrainienne Natalia Iaresko, copropriétaire de la société US « Horizon capital », connue comme l’amie de l’épouse américaine de l’ex-président Viktor Ioutchenko. (L’oligarque qui a précédé l’arrivée de Ianoukovitch). L’économie et le commerce seront contrôlés par le Lituanien Aïvaras Abromavitchus (Voir le rôle des oligarques de la communauté juive dans le Maïdan par BHL, lui-même), associé de la société d’investissement suédoise « East capital ». Sa société est un des grands investisseurs en Ukraine. Le Géorgien Alexandre Kwitachvili sera en charge de la santé publique. C’est lui qui avait lucrativement privatisé les hôpitaux dans sa patrie d’origine. Cette nomination de l’acolyte de Saakachvili, (le président géorgien, homme des USA) a été très mal prise à Tbilissi. La créature de Washington, l’oligarque Arseni Iatseniouk a conservé son poste de premier ministre. Poltorak, Avakov et Klimkine fidèles aux euro-idéaux, ont conservé les postes des ministres de la défense, de l’intérieur et des affaires étrangères.

L’Amérique nargue-t-elle la Russie dans l’espoir que celle-ci ouvre les hostilités? Ou bien l’avidité de ces gens-là est-elle si envahissante que la politique extérieure de ce pays est entièrement soumis aux intérêts privés ? C’est un mystère! Et pendant ce temps en l’espace d’une semaine on compte 600 morts de plus dans le Donbass, ce qui porte à plus de 5000 le nombre total des victimes de cette guerre civile aux relents internationaux.

Une folie qui a débuté avec les assassinats du Maïdan en février 2014, il a moins d’un an!

On imagine mal que ce face à face Russie/US au coeur de l’Europe puisse ne pas dégénérer; malgré les rodomontades de François Hollande qui assure que l’affaire sera réglée sous peu, jamais l’extension du conflit n’a été aussi palpable, et jamais l’impérialisme américain ne s’est manifesté de façon aussi sauvage.

François Hollande aura-t-il le courage d’aller à Washington rencontrer Obama pour plaider pour la désescalade comme il vient de la le faire à Moscou ? Ce n’est qu’alors que nous pourrions croire à l’indépendance de la politique étrangère de la France…. empêtrée dans l’affaire des Mistrals.

Dans la vidéo ci-dessous, le drapeau des USA à côté de celui de l’Ukraine est hissé à l’entrée de la SBU, l’administration de police politique de la junte de Kiev. Tout un symbole!

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Emilie Defresne

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