Que se passe-t-il réellement en Syrie ? Des sources sur place parlent de milliers de morts, d’enlèvements et d’un retour aux pratiques de l’État islamique.
Le président de transition du pays et son gouvernement de transition tentent depuis trois mois de présenter à l’Occident une image lisse et de faire paraître leurs intentions « légitimes ». Ils peuvent pour cela compter sur le soutien de plusieurs gouvernements occidentaux qui voulaient renverser Bachar al-Assad.
Al-Sharaa a publiquement parlé de ses « erreurs de jeunesse » dans des interviews qu’il a accordées aux plus grandes chaînes de télévision du monde lorsqu’on l’a interrogé sur son parcours au sein d’Al-Qaïda et sur ses opérations terroristes conjointes avec l’EI.
Al -Jolani, qui a abandonné son pseudonyme djihadiste et son uniforme de camouflage pour porter le costume occidental du président syrien, a déclaré que la persécution pour des raisons religieuses et politiques est interdite et que les chrétiens, les alévis et les druzes n’ont rien à craindre car ils sont, comme les musulmans, des parties égales de la nouvelle Syrie… Mais les faits contredisent les paroles.
Plus de 1 000 morts et des exécutions de civils par les forces gouvernementales djihadistes
En 24 heures vendredi, plus de 70 personnes ont perdu la vie dans des raids de bataillons armés, principalement dans la ville de Homs mais aussi dans le port de Lattaquié. Mais des sources de la région parlent de milliers de morts, d’enlèvements, d’exécutions de sang-froid, de meurtres retransmis en direct et d’une horreur et une terreur absolues.
Les forces venant d’Idlib – la province d’où Al-Sharaa est parti avec HTS et son armée jusqu’à ce qu’il conquière finalement Damas et renverse Assad et son gouvernement – ont envahi hier de manière coordonnée et avec des armes lourdes les deux zones spécifiques, dans le seul but de « tuer toutes les minorités religieuses de la région ».
Un chrétien syrien orthodoxe souligne que depuis deux mois, il est devenu courant à Damas que des bataillons armés, auxquels le gouvernement syrien a confié des missions de sécurité, attaquent des quartiers chrétiens et alaouites.
« Les menaces et les invasions de nos foyers sont un phénomène quotidien . » Ils nous font comprendre qu’il n’y aura plus d’autre religion en Syrie d’ici quelques mois. Ils nous disent que si nous ne partons pas, nous sommes morts. Ils frappent même des petits enfants et des femmes. Ils connaissent nos noms, nos maisons, où nous allons. « Nous sommes sur leur liste et ils ont des ordres clairs », explique ce chrétien syrien. Lui et sa famille font partie de la grande famille chrétienne de Syrie (orthodoxe et catholique) qui compte environ 400 000 membres à Damas et 300 000 autres dans le reste de la Syrie.
Commissariats de police transformés en centres d’application de la charia
Sa famille a récemment été prise pour cible alors qu’elle marchait dans une rue principale de la capitale syrienne. « Ils ont attaqué ma femme et mon enfant en leur disant que la Syrie n’était pas pour les chrétiens. » Ils n’ont pas été lynchés parce qu’un de nos voisins qui était sur les lieux et qui est musulman leur a dit qu’ils avaient tort et a donné très peu de temps à ma femme pour quitter les lieux.
Ces incidents sont-ils devenus fréquents ? « Ils arrivent tous les jours et ils sont nombreux. Ils profanent tout ce qui est chrétien. Ils ont récemment détruit toutes les tombes du plus grand cimetière chrétien de Damas. La croix est un défi pour eux. C’est comme si l’EI était entré à Damas. »
« La plupart de ceux qui menacent, cambriolent les maisons et terrorisent sont des membres des forces de sécurité d’aujourd’hui. Partout en Syrie, les commissariats de police ont été transformés en centres d’application de la charia et en lieux de torture. »
« Si personne ne peut nous aider d’une autre manière, qu’on nous donne les armes pour défendre nos familles, notre religion et nos maisons. »
Le ministère grec des Affaires étrangères a publié un communiqué concernant ce qui s’est passé vendredi :
« Nous sommes profondément alarmés par les informations faisant état d’affrontements violents ayant fait de nombreuses victimes civiles en Syrie. Nous appelons toutes les parties à faire preuve de responsabilité et à rechercher des solutions pacifiques, en s’abstenant de toute action susceptible d’attiser de nouvelles tensions.»
Mais ce communiqué ne fait aucune référence spécifique aux populations chrétiennes de la région.
Léo Kersauzie
Cet article vous a plu ? MPI est une association à but non lucratif qui offre un service de réinformation gratuit et qui ne subsiste que par la générosité de ses lecteurs. Merci de votre soutien !