« Je pense à Sainte-Sophie et je suis très affligé. » Ce sont les seuls mots qu’a prononcés hier durant l’Angélus dominical, le pape François au sujet de la décision historique du président turc de transformer l’ancienne basilique Sainte-Sophie en mosquée.

Tout à son projet de restauration de l’empire turc, le nostalgique de sa grandeur passée le président Recep Tayyip Erdogan a persévéré dans son entêtement concernant la conversion de Sainte Sophie en mosquée. Depuis son arrivée au pouvoir en 2003, les activités liées à l’islam se sont multipliées à l’intérieur de Sainte-Sophie, avec notamment des séances de lecture du Coran ou des prières collectives sur le parvis du monument.

Vendredi 10 juillet, le Conseil d’État, plus haut tribunal administratif de Turquie, a donc répondu favorablement aux demandes concernant cette transformation formulées depuis des années par plusieurs associations soutenues par Erdogan, qui argument que le sultan Mehmet II, le conquérant ottoman de Byzance en 1453, en avait fait une mosquée « à perpétuité ». En conséquence, ce statut, estime le Conseil d’État, n’aurait pas dû être modifié par Mustapha Kemal, père de la Turquie moderne et laïque, qui avait pris en 1934 la décision de la transformer en musée, désireux, disait-il de « l’offrir à l’humanité ».

Une heure à peine après cette décision, Erdogan a signé un décret faisant de l’ex-basilique Sainte-Sophie d’Istanbul à nouveau une mosquée, en dépit des inquiétudes exprimées par plusieurs pays ou institutions étrangers, notamment la Russie et la Grèce, qui suivent de près le sort du patrimoine byzantin en Turquie.

Dans une déclaration télévisée, le président Erdogan a précisé que la première prière musulmane à Sainte Sophie aura lieu le 24 juillet et que le lieu resterait ouvert aux visiteurs « Turcs et étrangers, musulmans et non-musulmans ».

L’Unesco, l’agence de l’ONU en charge de la culture, a annoncé qu’elle « regrettait vivement » la décision des autorités turques, « prise sans dialogue préalable », de « modifier le statut » de ce site classé au patrimoine mondial de l’humanité. Exprimant leur déception, les Etats-Unis ont dit prendre acte « de l’engagement du gouvernement turc de garantir un accès à Sainte-Sophie à tous les visiteurs » et disent avoir « hâte de voir ses plans de gestion de Sainte-Sophie pour qu’elle reste accessible à tous sans entrave ».

La France, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves le Drian, dit « déplorer » cette décision qui remet en cause « l’un des actes les plus symboliques de la Turquie moderne et laïque ». Le ministre grec de la Culture a dénoncé une « provocation envers le monde civilisé ».

Le patriarche de Constantinople Bartholomée estime de son côté que le changement de statut de Sainte-Sophie risque de créer une fracture entre l’Est et l’Ouest. Cette ancienne basilique byzantine est en effet un centre de vie « dans lequel s’embrassent Orient et Occident », et sa réaffectation au culte musulman « sera une cause de rupture entre ces deux mondes ». Cela poussera des millions de chrétiens dans le monde entier contre l’islam », s’est-il inquiété. Le patriarcat de Moscou a également réagi, disant « regretter que les voix de millions de chrétiens n’aient pas été entendues ».

« La transformation de Sainte-Sophie en mosquée est une gifle délibérée au visage de ceux qui croient encore que la Turquie est un pays séculier. Le système séculier du kémalisme (…) est ainsi déclaré aboli » souligne une native d’Istanbul, la romancière Asli Erdogan.

Face à toutes ces critiques, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a argué que cela relevait des « droits souverains » de son pays.

Cette reconversion de Sainte-Sophie, Å“uvre architecturale majeure construite au VIe siècle par les Byzantins qui y couronnaient leurs empereurs et haut lieu de la chrétienté, ne peut qu’amplifier les tensions géo-politiques et religieuses déjà existantes dans ce Moyen-Orient à feu et à sang. 

Francesca de Villasmundo

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