Le musée Vernon met en ce moment à l’honneur les huit siècles d’histoire d’un établissement emblématique de la ville : l’Hôpital de Vernon. Depuis l’Hôtel-Dieu fondé par saint Louis en 1260 jusqu’à l’hôpital actuel où se développe l’Imagerie par Résonance Magnétique (IRM), l’exposition tend à montrer la richesse historique et patrimoniale des différentes institutions qui se sont succédées à Vernon. Ponctué de documents d’archives, de photographies, de peintures et d’objets médicaux, le parcours d’exposition s’articule autour de thématiques variées afin d’offrir aux visiteurs une vision d’ensemble du lieu et de ses pratiques.

De par sa proximité avec Paris, Vernon met en pratique rapidement les politiques développées au niveau national et est pour cela emblématique de l’évolution de l’hospitalisation en France : les fondations royales de saint Louis dont la fonction première était d’offrir l’hospitalité,  la création d’un bureau des pauvres au XVIIème siècle ou encore les effets de la communalisation des centres de soins conduisant à la construction d’un nouvel Hôpital-Hospice en 1858.

Hôtel-Dieu, charité et hospitalité

La première maison-dieu, probablement fondée au XIIème siècle, était située sur l’île du Talus qui servait d’assise au pont médiéval. En 1256, lors d’un séjour à Vernon, Louis IX constata le délabrement de l’établissement et décida de le reconstruire au cœur de la ville. Ainsi, il acheta à grand prix des terrains intra-muros pour y bâtir le nouvel hôtel-Dieu qu’il dota richement de terres, prés et vignes ainsi que de rentes en argent ou en nature. Celui-ci s’étendait entre la rue du Pont, la rue de la Boucherie et la rue Grande (rue Carnot).  L’Hôtel-Dieu était alors considéré comme un lieu d’accueil pour les pauvres, les pèlerins et les exclus venant se procurer les soins de l’âme et du corps.

L’établissement fut dirigé par les sœurs hospitalières de la congrégation de Saint-Augustin qui apportèrent un réconfort moral et quelques secours techniques manifestant ainsi les vertus chrétiennes de charité et de compassion. Les sœurs désignèrent saint Louis comme saint patron dès la canonisation du monarque en 1297.

Les rois successifs continuèrent d’offrir leur protection à l’institution. Ainsi, Louis XIV  l’érigea en abbaye de l’ordre de Saint-Augustin en 1661. Au XVIIIe siècle, c’est l’un des établissements les plus importants de la province avec 35 religieuses, 15 sœurs converses, 2 chapelains, 1 confesseur et de nombreux domestiques.

Sous le Directoire, l’abbaye est conduite à la  laïcisation et les biens sont aliénés. L’Hôtel-Dieu subsiste jusqu’en 1858 lorsque l’administration des Ponts et Chaussés projette de percer une nouvelle rue (rue d’Albufera) traversant les bâtiments. Il fallut alors trouver un nouveau lieu d’accueil.

Hospice des pauvres, les œuvres de bienfaisance

Le 16 décembre 1657, Elisabeth de Vendôme,  Duchesse de Nemours convoque les notables, clercs et officiers de Vernon afin de créer le bureau des pauvres de la ville et de ses faubourgs. Celui-ci était présidé par un conseil d’administration de notables qui souhaitaient endiguer la pauvreté de la ville. Comme les nombreux bureaux créés à cette époque, l’établissement assiste par le travail les personnes valides et distribue nourriture et argent aux nécessiteux. Mme de Nemours était en effet une adepte des œuvres de bienfaisance de M. Vincent,  fondateur de la confrérie de la Charité et créateur des premiers hospices parisien.

Le règlement établi en 1658,  instaure un cadre précis et rigoureux dans le traitement des pauvres. Administrateurs et receveurs traitent les affaires du « dehors ». Directeur pour les hommes et directrice pour les femmes gèrent le bon ordre de la maison installée près de la tour du vieux René (place de Gaulle) et chaque admission (enfants, femmes, hommes) doit être validée par le conseil d’administration. Les adultes sont employés aux travaux manuels dans des manufactures de draps, bas de laine, boutons et dentelle. Les revenus de l’institution proviennent des donations et quêtes qui sont faites en ville.

Devenu rapidement à l’étroit le bureau des pauvres déménage dans un nouveau logis en 1724 : l’ancien hôtel particulier des familles Bonnemare, Bouville et  Croismare grâce à la générosité de l’administrateur le sieur Pattier qui achète cette maison pour la somme de 6000 livres. Quelque temps après le transfert de l’hospice des pauvres sur ce site, on ajoute un hospice des orphelins et des vieillards.

Hospice-Hôpital,  la modernisation de la médecine

Après la tourmente révolutionnaire,  la loi  du 16 vendémiaire an V  (7 octobre 1796) décrète que « les administrations municipales auront la surveillance immédiate des hospices civils établis dans leur arrondissement ». Ainsi, une commission administrative unique composée de 5 citoyens prend la gestion des hospices de Vernon, à savoir l’Hôtel-Dieu et l’hospice des pauvres qui continuent à avoir une organisation propre.

L’abbé Moulin, aumônier, le citoyen Prier, économe, puis le médecin citoyen Lelarge interviennent dans les deux établissements. La congrégation des sœurs hospitalières de Saint-Paul de Chartres assure sa mission auprès des malades et des pauvres.

Mais en 1858, suite à la construction du nouveau pont et au percement de la rue d’Albufera, la commission des hospices de Vernon présidée par le maire (M. Le Duc d’Albuféra), décide de fusionner les deux établissements pour permettre de réaliser des économies et prodiguer de meilleurs soins à la population vernonnaise ainsi qu’aux militaires en nombre croissant.

La mission est confiée à l’architecte Joseph-Louis Delbrouck, architecte de la ville. Le nouvel « hospice-Hôpital » s’inscrit dans son époque en corrélation avec les avancées médicales. Cette affirmation de la médicalisation a dû s’effectuer en tenant compte de la prégnance du religieux, sans être obligatoirement contradictoire. En effet, les pratiques de soins ont connu des transformations majeures grâce à l’essor de l’enseignement médical, les découvertes scientifiques ou pharmacologiques l’avènement d’une hygiène scientifique ou encore la diffusion de l’asepsie et de l’antisepsie… Ces évolutions se reflètent alors dans l’organisation du premier hôpital, ouvert en 1861.

Centre hospitalier à la pointe de la science médicale

Face à l’évolution de la médecine et des nouvelles technologies, le centre hospitalier Eure-Seine, a su s’adapter ces dernières décennies pour répondre aux besoins de la population.

L’architecture pavillonnaire du XIXe siècle étant devenue inadaptée,  la commission administrative de l’institution choisit dans les années 1960 de reconstruire un nouvel hôpital pour répondre aux attentes des services qui se développent : radiologie, laboratoire, chirurgie, urgences… Le choix se porte alors sur un bâtiment « bloc » disposé perpendiculairement à l’ancien hôpital et débordant sur la rue Benjamin Pied qui est alors fermée à la circulation. Les traces de ces transformations urbanistiques sont encore visibles de nos jours. Ce bâtiment construit en deux tranches, en 1967 et 1971, correspond aux besoins de rationalisation des services.

Le fonctionnement des hôpitaux régi par la loi du 31 décembre 1970 accorde aux établissements une autonomie juridique et financière sous la gestion d’un conseil d’administration. De nos jours, le centre Hospitalier Eure Seine regroupe les hôpitaux d’Evreux et de Vernon. L’établissement vernonnais, ancré au cœur de la ville, accueille 227 lits et 500 agents hospitaliers. En 2016, on y dénombrait 711 accouchements, 22 839 passages aux urgences et 2819 IRM.

Témoignage de l’histoire, l’hôpital est aussi un lieu de mémoire.

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