Le but de ce livre est de faire découvrir l’esprit profondément religieux qu’a manifesté Maurras tout au long de son existence. Le 14 septembre 1936, quand, pour la première fois, Charles Maurras prend la plume pour répondre à la lettre que lui a adressée une carmélite de Lisieux, Sœur Madeleine de Saint-Joseph (dont la sœur, également carmélite, a consacré sa vocation à la conversion de Maurras et vient de mourir de la tuberculose), il est dans l’attente d’une inquiétante décision de justice. Il s’est pourvu en cassation après sa condamnation à huit mois de prison ferme pour avoir, l’année précédente, attaqué Léon Blum et menacé d’un couteau de cuisine les députés qui décideraient d’intervenir militairement en Ethiopie contre l’Italie. Son pourvoi rejeté, Maurras est arrêté et incarcéré. C’est dans ce climat d’extrême violence politique que naît une correspondance parfaitement inattendue entre le chef de l’Action française et le Carmel de Lisieux.

L’événement est d’autant plus singulier qu’en cette fin de 1936, l’Action française est, depuis dix ans, un mouvement condamné par l’Eglise, et que la lecture de son quotidien est interdite aux catholiques, au risque d’être privés des sacrements. Jacques Bainville, mort cette année-là, s’est ainsi vu refuser des obsèques religieuses par l’archevêché de Paris.

Maurras est en prison depuis deux mois quand il écrit une lettre destinée au Pape Pie XI, auparavant si violemment attaqué dans les colonnes de l’Action française. Il envoie cette lettre au Carmel qui, de Lisieux, se charge de la transmettre directement au Pape. Survient alors l’événement le plus incroyable de cet épisode : Maurras, détenu à la prison de la Santé, reçoit une réponse manuscrite, écrite en français de la main même du Souverain Pontife. Son ton, empreint de bienveillance paternelle, marque un tournant dans les relations de l’Eglise avec l’Action française.

Comment le Pape Pie XI, qui fut si profondément hostile à Maurras, comme l’ont montré son attitude et ses décisions de 1926-1927, a-t-il pu, dix ans plus tard, lui adresser une telle lettre ? Nul doute que l’intervention du Carmel de Lisieux fut déterminante.

Pour Rome, le problème principal était l’agnosticisme de Maurras, supposé exercer une influence néfaste sur la jeunesse. Si seulement Maurras en venait à connaître son chemin de Damas, alors tout pourrait changer. Aussi, lorsqu’une des religieuses du Carmel, Sœur Madeleine de Saint-Joseph, eut une raison personnelle d’écrire à Maurras, Mère Agnès, fille de Louis et Zélie Martin, et sœur aînée de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, sentit aussitôt qu’elle avait là une carte à jouer.

Dès 1929, en effet, le Pape lui avait confié secrètement une mission spéciale : que le Carmel de Lisieux prie pour la conversion de Maurras. La prieure invita donc la jeune Sœur Madeleine, que le Ciel avait doté d’une belle plume, à écrire à ce combattant des idées qui, prisonnier de sa surdité, agnostique et mis à l’Index par l’Eglise, paraissait difficile à approcher. La réponse de Maurras parut si encourageante que Mère Agnès décida elle-aussi de lui écrire. C’est elle qui lui conseilla d’écrire une lettre au Pape. Le projet de lettre qu’il rédigea lui parut si convaincant que Mère Agnès l’expédia directement à Rome.

A partir de là, une longue et difficile négociation s’engagea. Deux autres carmélites furent mêlées à ces échanges épistolaires : Sœur Marie du Sacré-Cœur et Sœur Geneviève de la Sainte-Face. Ces religieuses n’étaient autres que les deux autres sœurs carmélites de Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. Toutes les quatre lisaient ensemble lisaient ensemble les lettres de leur “cher pèlerin” et mettaient au point ensemble celles qui lui seraient adressées. C’était leur manière de mettre sainte Thérèse au cœur de leur dispositif. Touché, Maurras qualifia ces réunions de “conseil d’Etat tenu par des anges”…

Cette persévérance inébranlable du Carmel ne fut pas vaine. Au témoignage indiscutable du prêtre qui l’a accompagné durant les derniers mois de sa vie et jusqu’à son dernier souffle, c’est muni des saints sacrements de l’Eglise catholique que Charles Maurras fut rappelé à Dieu le 16 novembre 1952.

La lecture de ces lettres échangées avec le Carmel est passionnante. Il s’agit d’un échange de correspondance de très haute tenue, de grande rigueur intellectuelle et d’absolue honnêteté qui place le Divin en permanence au centre des discussions. Chacun y trouvera matière à réflexion.

Un chemin de conversion, Correspondance choisie entre Charles Maurras et deux carmélites de Lisieux (1936-1952), rassemblée par Xavier Michaux, préface de Jean Sévillia, Pierre Téqui éditeur, 481 pages, 28 euros

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