Vaccins, Covid, industrie fœtale, initiatives politiques, crise de l’Eglise,

Traditionis Custodes, Mgr Lefebvre, une lueur d’espoir :

 un entretien sans faux-fuyants ni langue de bois…

« Un manque de courage pour lutter sans compromis contre le mal monstrueux qu’est l’industrie fœtale »

1 – Monseigneur (1), nous voulons d’abord vous exprimer notre gratitude pour l’honneur que vous faites à MPI [MEDIAS-PRESSE-INFO] en ayant accepté de répondre à nos questions. Nous avions relayé votre entretien à la télévision libanaise à propos des vaccins et de la situation dans le monde qui a suscité un immense intérêt. Vous y exprimiez une position d’une fermeté remarquable contre les vaccins fabriqués à partir de lignées fœtales et nous vous en remercions aussi. Mais, Monseigneur, comment expliquez-vous, alors que le scandale est si criant, que vous vous trouviez si isolé sur la ligne que vous défendez ?

La confusion sur la légitimité morale de l’usage des vaccins produits à partir de/ou testés avec des lignées cellulaires fœtales n’est qu’une partie d’une confusion beaucoup plus large concernant l’intégrité de la doctrine et de la moralité catholiques, une confusion qui prévaut dans la vie de l’Église depuis des décennies. Je crois que le compromis de la part des responsables du Saint-Siège, de nombreux évêques et même de prêtres et de laïcs d’esprit traditionnel, avec l’énorme mal de l’industrie fœtale en croissance quotidienne, dont le produit important est les vaccins souillés par l’avortement, c’est aussi un manque de courage pour lutter sans compromis contre le mal monstrueux qu’est l’industrie fœtale. La conséquence d’une lutte sans équivoque et sans compromis contre l’industrie fœtale est que l’on est socialement marginalisé et même étiqueté comme un ennemi de la santé ou comme un rigoriste moral, accusations qui, d’un point de vue objectif, sont bien sûr fausses.

« Nous vivons dans une dictature de péché, de perversion et de révolte contre les commandements de Dieu »

2 – Il est vrai que le refus strict que vous prônez conduit à des sacrifices héroïques comme la perte d’une situation professionnelle. Mais Dieu ne peut-il demander à certaines époques de l’histoire de son Eglise l’obligation d’être héroïque et de pratiquer des vertus héroïques pour demeurer chrétien ?

C’est tout à fait vrai. Personne ne peut douter que nous vivons à une époque qui présente clairement les caractéristiques d’une dictature athée mondiale et où le péché et la rébellion contre Dieu ont atteint des proportions presque inimaginables. Nous vivons dans une dictature de péché, de perversion et de révolte contre les commandements de Dieu. À mon avis, un rejet intransigeant et sans équivoque de toute collaboration avec l’industrie fœtale a quelques similitudes avec le rejet intransigeant de toute collaboration avec le culte des statues idolâtres ou le culte des statues impériales par les chrétiens des premiers siècles. On peut aussi penser à l’héroïsme des catholiques anglais et irlandais dans leur refus intransigeant de participer au culte protestant, ou au refus intransigeant du serment sur la Constitution par le clergé catholique en France, la Constitution civile du clergé, pendant la terreur de la Révolution française.

3 – Certains prêtres ont cependant argumenté en faveur de la légitimité de ces vaccins en se référant à saint Thomas. Celui-ci admet en particulier qu’on peut « se servir du péché d’autrui pour le bien » (De malo, q. 13, article 4 ad 17). Que leur répondriez-vous ?

De nombreuses hérésies morales de notre temps contiennent également des citations de saint Thomas et d’autres docteurs de l’église. On oublie cependant le point essentiel que ces citations ne s’appliquent pas à l’utilisation des produits souillés d’avortement et à l’industrie fœtale. Ces deux maux sont si monstrueux qu’ils sont incomparables avec d’autres maux qu’un chrétien accepte contre son gré dans une société impie. La justification de l’utilisation de vaccins souillées d’avortement et d’industrie fœtale constitue une grave omission de la part des catholiques, qui, dans une telle situation de l’industrie fœtale, qui est un péché criant vers le ciel, ont un devoir moral clair de protester et se distancier sans équivoque.

« Ceux qui se défendent par des moyens démocratiques sont appelés « ennemis du peuple ».

4 – L’obligation des masques et des mesures sanitaires suivie de celle de la vaccination puis du pass sanitaire manifestent un crescendo impressionnant d’une ligne d’autoritarisme planétaire d’asservissement des hommes. Nous avons certes conscience de notre obligation accrue de prier en ces circonstances. Mais la prière ne nous exonère pas d’un combat contre l’oligarchie destructrice. Comment voyez-vous un tel combat ?

Je crois que tous les moyens démocratiques doivent être utilisés pour se défendre contre le contrôle totalitaire de la vie privée par le gouvernement. Nous devons aussi nous défendre contre l’appropriation de notre corps par le gouvernement. Car une telle situation est l’expression d’un communisme extrême dans lequel tout appartient à l’État et la personne privée n’a absolument aucune propriété et aucun droit démocratique réel.

5 – Pensez-vous que les mesures prises dans beaucoup de pays contre la Covid participent d’une destruction de l’ordre naturel ?  Comment expliquez-vous la dimension mondiale de ces mesures ?

Je pense que votre avis est pertinent. Avec les mesures contre le Covid, les droits fondamentaux de l’individu sont restreints de manière disproportionnée et presque sans recours. Ceux qui se défendent par des moyens démocratiques sont appelés « ennemis du peuple ». Cela me rappelle presque la même terminologie utilisée dans la dictature du communisme soviétique, où quiconque critiquait l’idéologie de l’État était qualifié d’« ennemi du peuple » (en russe, « wrag naróda »).

« À titre d’exemple au niveau politique, pour faire le parallèle avec Civitas, je pense que nous pouvons prendre le gouvernement actuel de la Hongrie »

6 – Le combat nous paraît être mené en France par CIVITAS, seul parti politique à afficher publiquement son opposition radicale à la loi Veil sur l’avortement, la loi Taubira sur le « mariage » homosexuel, à vouloir l’éradication de la franc-maçonnerie et à lutter ostensiblement pour la doctrine sociale de l’Eglise et le règne social de Notre-Seigneur Jésus-Christ (2). Des initiatives de ce type existent-elles à votre connaissance dans d’autres pays ?

Je n’ai pas un aperçu précis de telles initiatives au niveau politique dans d’autres pays. Cependant, il existe diverses initiatives sur le plan social dans plusieurs pays, qui utilisent diverses mesures (manifestations pacifiques, campagnes de signatures, congrès, études) pour lutter contre les maux que vous avez énumérés. À titre d’exemple au niveau politique, pour faire le parallèle avec Civitas, je pense que nous pouvons prendre le gouvernement actuel de la Hongrie, qui essaie clairement de protéger son peuple contre l’idéologie de l’homosexualité et de l’avortement.

7 – N’y aurait-il pas un effort certes ambitieux, mais qui pourrait avoir un impact important, à rechercher la concentration internationale des oppositions ?

En effet, il y a un besoin urgent d’une concentration internationale de l’opposition à la dictature politique mondiale croissante de jour en jour, qui, sous divers prétextes astucieusement masqués, privent les gens des leurs droits fondamentaux. De tels prétextes sont par exemple la sécurité sanitaire, la non-discrimination à l’égard des minorités, l’égalité des droits pour tous. Avec tous ces prétextes, cependant, à une seule minorité, à savoir à la foi catholique, la nouvelle dictature politique refuse honteusement et sans appel tout droit démocratique et toute présence publique.

« En fait, il n’y a plus de place pour la prétendue herméneutique de la continuité »

8 – Orphelins sur le plan politique, nous le sommes aussi sur le plan religieux. Personne ne nous broie davantage le cœur que le pape François qui ne semble rechercher que la destruction des derniers îlots du catholicisme ? Les décisions qu’il a prises dans Traditionis custodes ont heurté beaucoup de catholiques parmi les plus fidèles. Pensez-vous qu’elles soient légitimes et aient force de loi ?

Le Motu Proprio et la lettre d’accompagnement commettent une injustice contre tous les catholiques qui adhèrent à la forme liturgique traditionnelle, en les accusant en généralisant de semer la discorde. L’argument invoqué dans le Motu Proprio et la lettre d’accompagnement, à savoir que la forme liturgique traditionnelle crée la division et menace l’unité de l’Église, est démenti par les faits. De plus, le ton désobligeant de ces documents à l’égard de la forme liturgique traditionnelle conduirait tout observateur impartial à conclure que de tels arguments ne sont qu’un prétexte et une ruse, et qu’il s´agit ici d´une autre chose.   

9 – Que conseillez-vous aux prêtres célébrant la messe traditionnelle, aux fidèles attachés à cette messe, et aux communautés religieuses célébrant cette liturgie ?

La messe traditionnelle est un trésor qui appartient à toute l’Église, car elle a été célébrée et profondément appréciée et aimée par les papes, les fidèles et les saints depuis au moins mille ans. En fait, la forme traditionnelle de la messe était presque identique pendant des siècles avant la publication du Missel du pape Pie V en 1570. Un trésor liturgique valable et très estimé depuis près de mille ans n’est pas la propriété privée d’un pape, dont il peut disposer librement. Par conséquent, les fidèles, les séminaristes et les prêtres doivent demander le droit d’utiliser ce trésor commun de l’Église, et s’ils se voient refuser ce droit, ils peuvent néanmoins l’utiliser, peut-être même de manière clandestine. Ce ne serait pas un acte de désobéissance, mais plutôt d’obéissance à la Sainte Mère l’Église, qui nous a donné ce trésor liturgique. Le refus ferme d’une forme liturgique presque millénaire par le Pape François représente, en fait, un phénomène de courte durée par rapport à l’esprit et à la praxis constants de l’Église.

10 – Le pape François, dans son motu proprio sur la messe, manifeste tant la continuité entre le concile Vatican II et la messe de Paul VI que l’opposition sous-jacente entre les deux rites. N’est-ce pas mettre en lumière l’impasse théologique de l’herméneutique de la continuité ?

Le pape François établit un contraste clair entre le rite traditionnel et le Novus Ordo, affirmant que le Novus Ordo est l´unique expression de la loi de la foi de l´Église romaine. En fait, il n’y a plus de place pour la prétendue herméneutique de la continuité, qui a toujours été maintenue de Paul VI à Benoît XVI, c’est-à-dire qu’il y a une vraie continuité entre le rite traditionnel et le Novus Ordo. Si une telle continuité existait, la coexistence des deux rites ne dérangerait jamais particulièrement personne. Cependant, la diffusion croissante des célébrations de la Messe traditionnelle révèle à tous qu’il existe – après un examen honnête et plus approfondi – une véritable rupture entre les deux rites aussi bien rituellement que doctrinalement. Le rite traditionnel est, pour ainsi dire, un reproche constant aux autorités du Saint-Siège qui leur veut dire : « Vous avez fait une révolution dans la liturgie. Retournez à une vraie continuité entre les deux formes liturgiques ». La réforme liturgique que les Pères du Concile avaient à l’esprit est celle que Paul VI a approuvée en 1965 et que les Pères du Concile ont célébrée lors de la dernière session. Mgr Lefebvre lui-même a célébré la messe selon la forme de 1965, ainsi que le séminaire d’Ecône dans les premières années. L’évidente non-continuité entre la Messe traditionnelle et celle de 1965 d’une part et la Messe de Paul VI d’autre part vise à inciter chacun à une réflexion plus approfondie, et à examiner honnêtement aussi des éléments possibles de la non-continuité doctrinale de certaines des déclarations du Concile Vatican II, un Concile de caractère pastorale, avec le Magistère doctrinal précédent et constant de l’Église.

« L’œuvre et le témoignage de Mgr Lefebvre apparaissent prophétiques et héroïques »

11 – Au regard de la situation angoissante dans laquelle se trouvent réduits les Instituts Ecclesia Dei Adflicta, ne peut-on finalement se demander si la conduite de Mgr Lefebvre face à Rome n’était pas la bonne ?

Il faut jeter un regard large sur la crise extraordinaire qui frappe l’Église depuis près de 60 ans et qui a atteint des proportions vraiment terrifiantes sous le pontificat du pape François. Cette crise croissante a ses racines aussi dans certaines déclarations ambiguës du Concile et surtout dans la nouvelle messe de Paul VI, qui représente pour tout observateur objectif une sorte de révolution liturgique. À la lumière de l’évidence de cette crise de l’Église, que l’on peut le mieux comparer à la crise arienne du IVe siècle, l’œuvre et le témoignage de Mgr Lefebvre apparaissent prophétiques et héroïques, car il était guidé uniquement par son fidèle attachement à ce que l’Église a toujours enseigné et à la manière dont elle a célébré la Sainte Messe au cours des millénaires. Mgr Lefebvre n’a pas introduit des particularismes ou des nouveautés, mais seulement ce qu’il avait lui-même reçu de l’Église dans son enfance, dans sa jeunesse, dans sa formation au séminaire et dans son ordination épiscopale. Je pense qu’après cette crise, l’Église l’en remerciera.

12 – Il y a plus de 5 000 évêques dans le monde. Pensez-vous que certains d’autres eux rejoindront le combat que vous menez ?

Je pense qu’il y a, tout à fait, encore des évêques dans l’église qui vivent l’intégrité de la foi et de la liturgie avec conviction et l’aiment. Cependant, il n’y a pas un grand nombre d’évêques qui s’engagent pour cela publiquement. Parfois, la raison en est la faiblesse humaine et la peur d’être exposé, ou la peur d’une attaque ; dans certains cas, c’est la peur de ne pas pouvoir faire carrière ou même d´être relevé de sa charge. C’est compréhensible car c’est aussi une expérience humaine que les officiers peuvent trouver difficile de mener un combat sans le soutien de leur général. En luttant pour maintenir et transmettre la pureté de la foi, de la morale et de la liturgie, les évêques doivent se rappeler que leur véritable général est Jésus-Christ, l’Éternel Souverain Prêtre et le Roi des Rois. Chaque Pape, qui n’est que son Vicaire, doit aussi montrer le plus grand exemple d’obéissance à la tradition immuable de la foi et du culte divin. Le Christ surmontera cette crise sans précédent de l’Église, qui est aussi en grande partie une crise des évêques. Christus vincit !

Monseigneur, nous avons un extrême besoin de vrais évêques, vraiment catholiques et nous vous remercions de votre courage épiscopal qui nous laisse entrevoir des lendemains qui pourraient nous réjouir. Nous vous exprimons l’espérance que nous mettons en vous et nous vous remercions avec gratitude d’avoir pris le temps de répondre à nos questions.

Entretien recueilli par Christian LASSALE pour MPI© – Astana, le 21 septembre 2021, en la fête de saint Mathieu, Apôtre et Évangéliste

Notes de bas de page
(1) Notice biographique de Mgr Athanasius SCHNEIDER : ORC [Chanoines réguliers de la Sainte-Croix de Coïmbre], né Anton Schneider le 7 avril 1961 à Tokmok en république socialiste soviétique de Kirghizie, est l’évêque auxiliaire de l’archidiocèse catholique d’Astana (érigé le 7 mai 2003) au Kazakhstan.

(2) Voir ici le programme dont il est question

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