Les dons pour ACIM ASIA doivent être envoyés au :

Dr Jean-Pierre Dickès
2, route d’Equihen
62360 St-Etienne-du-Mont

Il est rappelé que la totalité des dons est envoyée à la mission sans prélèvement de quelque nature que ce soit.
D’autant qu’ACIM France prend en charge intégralement le fonctionnement de sa petite sœur d’Asie. Tous les volontaires sont les bienvenus tout au long de l’année.

Ils arrivent du monde entier, étudiants, retraités, de 19 à 76 ans, médecins, informaticiens, enseignants, infirmières, etc. Ils sont allés de Manille à General Santos sur trois vols différents, après un voyage au long cours avec plusieurs escales, et une ou deux nuits sans sommeil… Mais ils sont tous heureux d’être là, pour découvrir ou recommencer la fabuleuse aventure annuelle qu’est la mission Rosa Mystica !

Voici une liste rapide des différentes nationalités représentées à la mission : beaucoup de Philippins et de Français comme chaque année ; cinq Américaines venues à la suite de notre intrépide Christina ; une Canadienne qui s’est promis de rentrer au Québec sans avoir été contaminée par l’accent français ; trois Allemandes et une Autrichienne, rigoureusement efficaces, mais un peu perturbées au début par l’organisation « à la philippine », si éloignée du modèle germanique ; une Belge, quelques Suisses, un séminariste d’Australie ; sans oublier plusieurs asiatiques venus de Chine, du Cambodge, du Vietnam et de Malaisie. Soit quatre continents et treize pays réunis pour la bonne cause. Rendons-leur hommage pour leur mobilisation et leur dévouement ! Et bravo au docteur Dickès qui a su donner une telle ampleur à la mission depuis dix ans !

Nous sommes à nouveau tout au sud du pays, dans l’île de Mindanao, terre de feu et de terroristes, c’est pourquoi la misère y est grande. Cette année, le gouverneur de la province voisine de Sarangani nous accueille dans son Capitole, modeste réplique du Capitole américain. Nous sommes derrière le palais officiel dans un grand gymnase sécurisé par l’armée.

Programme habituel d’une journée de mission : La première étape est l’enregistrement, pour prendre les coordonnées de chacun, leur poids, leur taille, leur tension si besoin, et juger du mal à soigner ; ensuite, nos volontaires devenus agents de circulation répartissent les gens par zone, selon le médecin qu’ils vont aller consulter. Et là commence une longue attente, occupée par les Sœurs qui enseignent le catéchisme et font colorier les enfants. Quand le médecin –généraliste, pédiatre, dentiste, ophtalmo- a été consulté, recommence l’attente devant la pharmacie. Depuis des années, Brigitte supervise celle des adultes avec efficacité, aidée par son équipe de préparatrices. Une chose est de traiter tranquillement une ordonnance dans l’arrière-boutique d’une pharmacie propre et silencieuse ; une autre chose est de voir défiler les prescriptions à raison d’environ dix par heure, et de ne pas se tromper dans les comptes de ml, de gouttes ou de demi-comprimés au milieu d’un gymnase sonore et plein d’enfants sautillants. Cela tient de la prouesse sportive et intellectuelle ! En parallèle, la pharmacie des enfants a également un rendement incroyable : en plus des médicaments spécifiques, presque chaque enfant repart avec plusieurs boîtes de vitamines, histoire de pallier la mauvaise alimentation pendant quelques semaines. Pour occuper les grappes d’enfants qui attendent, Anne-Maëlle et Virginie deviennent maquilleuses professionnelles : les petits minois philippins se transforment en chats, souris, papillons, clowns, et drapeaux franco-philippins ! Quelques patients, plus gravement atteints, passent au « refferal »  avant de partir, où ils sont inscrits pour des examens ou des soins à l’hôpital ; ils devront donc revenir faire le point dans quelques jours.

Cette année, nous avons trois prêtres pour la mission : monsieur l’abbé Stehlin qui a pu se libérer pour passer quelques jours avec nous, monsieur l’abbé Tim Pfeiffer, sur place depuis plusieurs années déjà, et monsieur l’abbé Péron, qui découvre la vocation de prêtre missionnaire…  A peine arrivé, il est envoyé desservir une paroisse à quelques heures de jeepnee, puis préside une Mary’s Mission en imposant pas moins de 390 scapulaires ; il fait le premier cours de catéchisme de sa vie en anglais et reçoit ensuite des centaines d’engagement dans la Légion de Marie… Non nobis, Domine !

Entre deux attentes, les prêtres bénissent les malades et leur imposent le scapulaire. Monsieur l’abbé Péron (quand il est là) fait usage de ses flûtes magiques pour attirer les enfants : ils s’approchent d’abord timidement puis applaudissent et sautent de joie en reconnaissant l’hymne philippin ! Les cœurs sont gagnés, le chemin est ouvert pour enseigner les âmes.

Les médecins doivent soigner une personne gravement brûlée au crâne, une autre qui a une plaie douloureuse et infectée : le médecin en retire des cailloux ! Beaucoup ont de l’hypertension, sans doute à cause de leur alimentation déséquilibrée. Une femme a un goitre de grosse taille qu’elle n’a jamais voulu faire soigner. Peur ? Insouciance ? Pauvreté ? Elle nous explique son histoire : mère de six enfants, elle a le souci de bien s’en occuper, de les nourrir décemment, mais son mari parti à la pêche a été tué par des pirates… Quand son goitre s’est formé, elle n’a jamais envisagé de soins, voulant garder pour ses enfants le peu d’argent qu’elle avait. Autre cas douloureux : un enfant de trois ans ne pèse que six kilos, sa maman nous dit qu’il vomit tout ce qu’il mange. En fait, il a une tumeur à l’œil, ce doit être un cancer déjà bien avancé. Il est envoyé d’urgence à l’hôpital pour se faire opérer, la mission financera tous les frais. Il est toujours délicat de décider qui « mérite » de se faire opérer ou non : les finances d’Acim-Asia ne sont pas inépuisables, il faut donc en disposer avec une charité qui reste raisonnable.

Nous voyons également arriver un homme diabétique qui s’est fait amputer la semaine dernière en transfémoral. Il est venu montrer son moignon, mal cicatrisé : le seul traitement qu’il faisait était de mettre dessus une poudre d’origine douteuse, et de recouvrir avec une compresse scotchée. Et bien entendu, il ne nettoyait pas entre deux pseudo-pansements. Donc la plaie ne s’est pas cicatrisée, elle s’est vite infectée et déjà presque nécrosée.  Claire a dû passer une heure à nettoyer la plaie. Autrement, un jeune homme de 14 ans avait une simple coupure au doigt de pied, mais il ne s’est pas soigné ; un fort impétigo s’est déclaré, il a le pied purulent, le médecin est obligé de lui prescrire immédiatement un antibiotique. Une maman nous amène son garçon de six ans qui a l’abdomen très dur et fait des infections urinaires à répétition : le médecin lui découvre une malformation qui pourrait vite entraîner une septicémie. Il faut agir vite, ce sera une lourde opération. Autre cas grave : un homme de 60 ans qui fait de l’hypertension. Par prudence, une infirmière lui fait un ECG et détecte une arythmie des contractions du cœur avec dissociation auriculo-ventriculaire. Il est envoyé d’urgence chez un cardiologue, il aura peut-être besoin d’une longue opération du cœur.

Tandis que tout ce travail médical s’effectue au gymnase, quelques volontaires vont découvrir une « Marys’mission » avec Father Tim. Inutile d’essayer de comparer la Milice de l’Immaculée française avec celle d’ici : la mentalité des gens est tellement différente que le « travail d’approche » ne se fait pas du tout de la même façon. Retour à l’époque du père Kolbe : on bat la campagne pour faire venir les gens à l’église, et ils viennent !

Alors que nous arrivons à Noralah pour commencer la mission, les femmes du baranguay (quartier de la ville) nous font signe de les suivre. Father Tim s’exécute, et nous voilà bientôt devant une table dressée pour nous, garnie d’au moins dix plats différents, porc en sauce, sardines grillées, nems, riz, pâtes, gâteau de coco, etc. Ce n’est pas très conforme à l’esprit de détachement de la Milice ! Mais il faut aussi montrer notre reconnaissance, et goûter tant bien que mal à tout cela. Au dessert, Father Tim gronde gentiment les dames en leur disant que cela n’est pas prévu dans le déroulement des « Marys’ Mission » ; si elles recommencent, il leur donnera vingt pompes à faire !

Les préparatifs commencent dans le petit gymnase : mise en place de l’autel pour la messe du soir, et installation de la Vierge de Fatima sur son brancard. La procession se met lentement en route. Le principe est le suivant : La Vierge est portée devant en ambassadrice, les fidèles suivent, le prêtre marche à l’arrière avec micro et haut-parleur ; il nous fait réciter le chapelet, et fait l’annonce suivante entre chaque dizaine : « Chers amis, la Vierge Marie vient vous rendre visite ! C’est votre mère à tous, elle vous apporte protection et bonheur ! Si vous voulez vous consacrer à elle, venez à 5h, il y aura la messe, et vous recevrez comme cadeau de la Vierge son scapulaire et sa médaille. A 5h, au gymnase San Miguel, votre Mère du Ciel vous attend ! » En fait de procession, nous marchons bien deux heures et demie, en alternant béton brûlant des routes et fraîcheur des chemins de traverse. Au gré des kilomètres, la file des pèlerins s’allonge. Et quand nous sommes de retour au gymnase, presque tous les habitants du baranguay sont là ! Il y a ceux qui ont marché avec nous derrière la Vierge, et ceux qui nous attendent sur place pour la messe. Beaucoup d’enfants courent partout, le recueillement est très relatif, mais enfin ils sont là, et le sermon théâtral et tonitruant de Father Tim décidera presque tout le monde à s’engager dans la Milice.

Après la messe, il y a d’abord l’imposition des scapulaires : il suffit de le porter tout le temps autour du cou avec dévotion, de réciter trois Ave Maria par jour, et la Sainte Vierge promet de nous éviter  l’enfer ; vous pensez bien que les Philippins ne se le font pas dire deux fois, on ne refuse pas un « talisman » si efficace ! Pour l’étape suivante, ils ont besoin de savoir un peu plus à quoi ils s’engagent : le Père leur expose dans les grandes lignes la religion catholique, et le rôle de la Milice qui se consacre à la Sainte Vierge et promet de répandre son nom. Pour pouvoir y accéder, il faut être baptisé, porter la médaille, et s’engager à faire quelque chose pour la Vierge. Puis c’est le moment de réflexion avant de s’engager. Distribution de fiches d’inscription, puis validation par les catéchistes. Les enfants doivent apprendre une prière par cœur pour manifester leur bonne volonté. Quand l’aspect technique des enrôlements est clos, vient la cérémonie d’intronisation, avec renouvellement des promesses du baptême et engagement à servir Marie. Les attitudes sont variées : certains visages sont recueillis et graves, d’autres curieux et souriants ; certains s’engagent pour faire comme les autres ; et il y a ceux qui comprennent mal l’anglais et suivent le mouvement. Father Tim a bien conscience que la terre dans laquelle il sème n’est pas toujours fertile, mais il voit là son vrai travail de missionnaire : semer et beaucoup cultiver ; puis, peut-être, un jour, récolter.

Pour couronner le tout, le capitaine lui-même vient au pied de la Vierge et lui consacre officiellement tout son baranguay. Imaginez le quart de la moitié de ce genre de cérémonie en France… On croit rêver !

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