Jorge Maria Bergoglio, depuis qu’il est monté sur le trône pétrinien, ne cesse de le répéter : “l’Église est malade”, il faut qu’elle sorte d’elle-même, qu’elle aille aux périphéries. Il s’est donc donné une mission : lui donner un nouveau visage en la réformant, non en la recentrant sur Dieu et en faisant revenir l’humanité au Christ, mais en l’ouvrant encore plus au monde, à ses modes, à son anthropocentrisme, à ses défis naturalistes… Dans l’utopique espoir que l’humanité, sur laquelle se penche cette bienveillance débonnaire d’une Église conciliaire soumise pour lui complaire et l’attirer aux diktats sociétaux et moraux contemporains, deviendra ainsi meilleure, plus bonne, plus belle, plus tout… De ce souhait découlent les propositions ambiguës et ce fameux discernement pastoral « analytique et diversifié » concernant la communion aux divorcés remariés contenus dans Amoris Laetitia, exhortation qui elle-même s’appuie sur la doctrine relativiste de Vatican II.

Exhortation dont les propositions contraires à l’enseignement catholique ont poussé 40 théologiens et prêtres à écrire et signer une Correction filiale concernant la propagation d’hérésies adressée au pape François le 11 août dernier. N’ayant pas obtenu de réponse de la part du récipiendaire, ils l’ont publiée sur le web dimanche dernier, 24 septembre.

Aujourd’hui 29 septembre, fort à propos dirons-nous, sort un article sur la pensée du pape François signé du père jésuite Antonio Spadaro, confident du pontife argentin et directeur de la revue de la compagnie de Jésus La Civiltà cattolica. Ce qui n’est un secret pour personne c’est que La Civiltà cattolica est un organe officieux de la communication bergoglienne et un support à sa réforme de l’Église officielle. Dans cet texte, le père Spadaro retrace le voyage du pape en Colombie du 6 au 11 septembre 2017 et sa rencontre, dans la ville de Carthagène, avec une délégation de la compagnie de Jésus composée de 65 religieux. Ceux-ci ont été invités à poser des questions à leur confrère devenu pape.

Le père Spadaro a retranscrit la dernière question d’un certain père Vicente Durán Casas :

« Saint-Père, de nouveau merci pour votre visite. J’enseigne la philosophie et j’aimerais savoir, au nom également de mes collègues professeurs de théologie, ce que l’on attend de la réflexion philosophique et théologique dans un pays comme le nôtre et dans l’Église en général».

L’auteur d’Amoris Laetitia, en s’adressant au père Casas, en a profité pour revenir sur son exhortation sur la famille. Sa réponse a bien l’air d’être une riposte détournée aux signataires de la Correctio filialis :

«Je profite de cette question pour dire une chose que je pense devoir être dite par justice et aussi par charité. En effet, j’entends beaucoup de commentaires — respectables, car exprimés par des fils de Dieu, mais erronés — à propos de l’Exhortation apostolique post-synodale. Pour comprendre Amoris laetitia, il faut la lire de A à Z. En commençant par le premier chapitre, en continuant par le deuxième et ainsi de suite… et réfléchir. Et lire ce qui s’est dit dans le Synode.

Une seconde chose : certains soutiennent que derrière Amoris laetitia, il n’y a pas de morale catholique, ou, tout du moins, que ce n’est pas une morale sûre. À ce sujet, je veux rappeler de manière claire que la morale d’Amoris laetitia est une morale thomiste, celle du grand Thomas. Vous pouvez en parler avec un grand théologien, parmi les meilleurs aujourd’hui et parmi les plus matures, le cardinal Schönborn. Cela, je veux le dire pour que vous aidiez les personnes qui croient que la morale est une pure casuistique. Aidez-les à se rendre compte que le grand Thomas possède une très grande richesse, capable de nous inspirer encore aujourd’hui. Mais à genoux, toujours à genoux… »

Cette réponse suscite quelques réflexions : premièrement, ce pape qui parle constamment de dialogue, de rencontre, d’écoute, ne souhaite pas semble-t-il « dialoguer » avec les signataires de la lettre. C’est en s’adressant à ses amis jésuites latino-américains qu’il leur fait passer un message. Il ne daigne même pas s’adresser à eux directement.

Deuxièmement, s’il évoque les « commentaires respectables » des opposants à Amoris laetitia, tout de suite après il précise que leurs jugements sont erronés mais ne donne pour autant aucune preuve de ce qu’il avance. Façon de clore le débat et la confrontation sur la question qu’il a fuis systématiquement. Là-aussi, c’est un peu court pour un inconditionnel du sacro-saint « dialogue » et de « la culture de la rencontre ». Il prend plus de temps à rencontrer, écouter et parler avec les hérétiques à qui d’ailleurs il ne se permet jamais de rappeler que leurs doctrines sont erronées et condamnées par l’Église qu’avec des catholiques fidèles ! Au contraire, il encense leurs commentaires et jugement doctrinaux, les louanges qu’il tresse à Luther en sont un exemple frappant…

Troisièmement, il affirme, alors que les signataires de la Correctio, argumentaire à l’appui, prétendent le contraire, que la morale contenue dans Amoris laetitia est « thomiste », « celle du grand Thomas », ce qui signifie donc logiquement qu’elle est en adéquation avec l’enseignement du Christ dont le docteur angélique fut le grand interprète. Même réflexion qu’au-dessus : il ne donne aucun argument pour prouver ce qu’il énonce. Enfin, un seul : le cardinal Schönborn dit cela, un point c’est tout, c’est suffisant. La parole du cardinal serait-elle parole infaillible ? Or une discussion théologique ne se mène pas de cette façon, même quand on est pape. Quelle que soit la fonction dont on est revêtu au sein de l’Église, il faut apporter divers arguments pour étayer ses affirmations théologiques. Une telle réponse lapidaire c’est donc faire injure aux signataires traités comme des enfants simplets. Et parallèlement une autre manière de se soustraire à la discussion théologique avec les auteurs de la Correction filiale.

Quatrièmement : in cauda venenum (dans la queue le venin) dit l’adage ! Le pape François termine son petit propos oblique aux signataires de ce document critique sur Amoris Laetitia et ses hérésies par une double annonce. Il débute par un encensement du très progressiste cardinal Schönborn, admirateur de l’exhortation bergoglienne dont il a donné une interprétation très libérale qui a parfaitement convenu à François. C’est « un grand théologien, parmi les meilleurs aujourd’hui et parmi les plus matures » a assuré le pape aux jésuites, comprenez à demi-mot qu’il est bien meilleur que les théologiens de la Correction. Et il termine par une pique acéré envers « les personnes qui croient que la morale est une pure casuistique », périphrase pour évoquer les “rigoristes” de la Correctio Filialis  : «Aidez-les à se rendre compte que le grand Thomas possède une très grande richesse, capable de nous inspirer encore aujourd’hui. Mais à genoux, toujours à genoux… » La boucle est bouclée : avec ces quelques mots désobligeants pour les uns, complaisants pour l’autre, il déconsidère totalement les signataires. Ces derniers passent pour des personnes qui ne prient pas et sont orgueilleux (ne pas se mettre à genoux  se dit d’un orgueilleux et/ou d’un impie) ce qui fait d’eux des théologiens et prêtres qui ne comprennent pas “la grande richesse” du “grand Thomas”, que le cardinal Schönborn a su faire découvrir au monde d’aujourd’hui. Certainement le cardinal autrichien l’étudie à genoux...

Le pape François paraît être très à l’aise dans l’Argumentum ad personam, cet art de la manipulation qui consiste à discréditer son adversaire sans lui répondre sur le fond. C’est, pour l’instant du moins, la seule réponse pontificale dont devront se contenter les signataires de la Correctio filialis.

Francesca de Villasmundo  

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