Christophe Dickès, sous la direction duquel a été publié il y a trois mois, un Dictionnaire du Vatican et du Saint-Siège, a très aimablement accepté de répondre aux questions de Medias-presse.info et de nous présenter son ouvrage.

Christophe Dickès: Après des études à la Sorbonne (Paris-IV) où il se spécialise en histoire des idées politiques et en histoire contemporaine des relations internationales, il obtient un doctorat sous la direction du professeur Georges-Henri Soutou (2004). En 2004, il intègre l’équipe de journalistes de Canal Académie, une des toutes premières radios web de la toile chargée de mettre en valeur les travaux des Académies formant l’Institut de France. Il y est responsable d’éditions des émissions Un jour dans l’Histoire et Les cinq minutes de Clio. En 2007, il prend en charge la rubrique de politique étrangère du Saint-Siège dans le bimensuel catholique ”L’Homme nouveau”. Trois ans plus tard, les éditions Robert Laffont lui confient la direction d’un Dictionnaire du Vatican et du Saint-Siège couvrant la période de 1870 à nos jours.

 

Quels sont les thèmes abordés par le Dictionnaire du Vatican et du Saint-Siège ?

Le Dictionnaire est avant tout un dictionnaire d’histoire contemporaine, c’est-à-dire qu’il aborde tous les pontificats de Pie IX (1846-1878) au pape François. En effet, l’histoire contemporaine de la papauté commence avec la fameuse perte des Etats pontificaux en 1870. Tous les règnes des papes sont ainsi abordés ainsi que les grands personnages qui ont fait le Vatican et le Saint-Siège : les cardinaux Secrétaires d’Etat (de Rampolla à Gasparri ou Sodano, de Merry del Val à Parolin qui vient de prendre ses fonctions le 15 octobre dernier), les cardinaux  français de curie (Tisserant, Villot…), les grandes figures du XXe siècle…

Qu’en est-il de la chronologie ?

L’histoire suppose effectivement d’apprécier le rôle des papes dans les grands événements qui ponctuent la période : la Grande Guerre de 1914 et la Deuxième Guerre, mais aussi la colonisation et la décolonisation, l’idée européenne, la crise de Cuba et la Guerre froide, la Chute du Mur de Berlin jusqu’à la crise économique de 2008. Tous ces évènements sont traités. Ce dictionnaire s’inscrit aussi dans l’histoire des idées politiques puisqu’il aborde l’appréciation par le magistère des idées du XXe siècle : libéralisme, communisme, nazisme, athéisme, relativisme… Enfin toute la dimension diplomatique et le rôle international du Saint-Siège sont abordés : quelles furent les relations entre les grands pays ou continents (France, Etats-Unis, Russie, Afrique, etc.) et le Saint-Siège ? Cela passe aussi par une description précise des fonctions au sein de cet appareil diplomatique: qu’est-ce qu’un nonce, un légat, un visiteur apostolique ?… Nous répondons à toutes ces interrogations.

Vous opérez une distinction entre Saint-Siège et Vatican, pourquoi cela ?

Parce que ce sont deux réalités juridiques différentes. A la tête du Saint-Siège trône le Christ puis son vicaire, le pape. Le Saint-Siège est le gouvernement de l’Eglise catholique dont le champ d’action est universel. Pour gérer cette universalité, l’Eglise possède un réseau diplomatique impressionnant : plus de 180 représentations à travers le monde. Le premier rôle de ce réseau est de défendre l’exercice du culte, la liberté d’enseignement, de lutter aussi contre les idéologies telles que, aujourd’hui, le relativisme. Bref de protéger  et d’aider les catholiques là où ils se trouvent. La rencontre entre Vladimir Poutine et le pape François en décembre dernier entre dans ce cadre. De fait, le pape argentin compte sur la Russie pour jouer un rôle au Moyen-Orient en protégeant les minorités chrétiennes qui y sont persécutées.

Et le Vatican donc, que représente-t-il ?

Le Vatican est, lui, le plus petit Etat du monde (44 hectares). C’est une forme de garantie temporelle de l’indépendance des papes. La papauté n’est pas itinérante. Elle possède une assise territoriale, minuscule certes, mais qui lui permet de n’être soumise à aucune puissance. Dans le Dictionnaire nous décrivons le « petit monde du Vatican » c’est-à-dire sa vie quotidienne dans tous ses aspects : la journée d’un enfant de chœur, la place des employés au sein de l’Etat, la citoyenneté vaticane, le rôle des femmes au sein des institutions, les fonctions de chacun, etc. Naturellement, nous présentons tous les bâtiments, lieux et places : des appartements pontificaux à la maison Sainte-Marthe que le pape François occupe, du Monastère Mater Ecclesiae où réside le pape émérite à la Maison Pie IV qui abrite l’Académie pontificale des Sciences… D’ailleurs, toutes les institutions (Académies, Congrégations, Conseils, Directions…) sont minutieusement abordées. La curie et ses réformes (car il y en a eu trois au XXe siècle), le rôle des cardinaux, etc. sont aussi et évidemment largement traités.

Un dictionnaire peut-il être obsolète rapidement du fait par exemple de la Réforme actuelle de la curie ?

Non parce, encore une fois, il s’agit d’abord d’un dictionnaire historique, donc 98% de son contenu est lié à la longue période de 1870 à 2013. De plus et bien au contraire, il constitue un excellent éclairage dans le contexte des réformes que le pape François souhaite mettre en place. De plus, Il faudra aussi du temps pour jauger et apprécier le résultat des réformes mises en place. Pour l’instant, très peu de choses concrètes ont été actées à l’exception de la création du fameux G8 –une commission de 8 cardinaux- dont le rôle et la place restent confidentiels. Ainsi, ceux qui souhaitent connaître à la fois la nature du pouvoir des papes, le sens par exemple du titre « évêque de Rome » que le pape François ne cesse d’utiliser, tout comme la nature de la collégialité, du synode ou encore la question de la subsidiarité ouvriront le dictionnaire. Tous ces thèmes s’inscrivent dans l’actualité et permettront au lecteur de mieux saisir les enjeux du temps présents.

Vous n’avez pas été seul pour faire ce dictionnaire ?

Non, naturellement. J’ai eu la joie de travailler avec une équipe internationale de quarante-cinq auteurs. Des vaticanistes, des historiens mais aussi des juristes et un ou deux théologiens. Même s’il ne s’agit pas d’un dictionnaire théologique ou philosophique. Chacun a travaillé selon sa spécialité. Un directeur des Ressources humaines d’une grande société internationale a par exemple traité des employés du Vatican et de ce que l’on appelle le Bureau central du travail qui gère tous ceux qui exercent une profession pour le Saint-Siège et le Vatican.

Cela fait presque trois mois que le dictionnaire est sorti, comment est-il accueilli ?

Très bien et je m’en réjouis vivement. Il sera présenté prochainement à Rome, après un parcours médiatique riche en France mais aussi en Belgique. Mon éditeur réalise un excellent travail. Il faut dire que je bénéficie aussi d’un excellent VRP : le pape François lui-même. Personnage médiatique, plus peut-être que ne le fut Jean-Paul II, le pape François est « passé » des pages « sociétés » dans les journaux, aux pages d’actualité. J’écris, dans ma longue introduction au dictionnaire, que nous assistons à un retour du religieux. Il suffit de voir les étalages des libraires. Récemment, j’étais surpris de voir qu’à la Fnac de Paris-La Défense par exemple, des ouvrages sur le pape François et du pape François étaient largement mis en avant. Les ouvrages de Benoît XVI, surtout sa fameuse trilogie consacrée à Jésus, bénéficiaient de la même exposition. Ce retour du religieux n’est pas nouveau : voyez par exemple le succès du film Des hommes et des Dieux. Dans le contexte de postmodernité en crise –crise économique mais aussi politique et sociale, la fameuse prophétie de Malraux sur le XXIe siècle religieux semble se vérifier.

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